Depuis le 2 juin, une grève parasite le fonctionnement du groupe hospitalier psychiatrique Paul-Guiraud, à Villejuif (94). C’est la remise en cause de l’organisation du travail en 8 heures - pour passer à 7h36 - et la perte de 9,5 jours de RTT qui a mis le feu aux poudres.
« Nous ne parlons pas le même langage, résume Sandrine Garandel, IDE et déléguée syndicale Sud Santé. Eux, ce sont des gestionnaires et des économistes; nous, nous sommes des soignants et des techniciens de la santé. Ils ne savent pas quel est notre quotidien. Nous avons besoin de ces jours de repos car en psychiatrie, ce n’est pas comme en MCO, on est avec le patient en permanence. »
« Il y aura toujours des dépassements »
De son côté, la direction s’appuie sur le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) signé avec l’ARS et un rapport de l’Igas, datant de l’été 2013, pour justifier l’évolution : « La plupart des hôpitaux sont déjà passés en 7h36, explique Henry Poinsignon, directeur de l’établissement. Ici, nous avons des temps de transmission de 1h30, alors que 15 à 30 minutes sont réellement nécessaires. » Une affirmation qui hérisse les grévistes de l’établissement. « Ce temps, nous l’utilisons pour procéder à des accompagnements auprès de médecins spécialistes, des sorties, du travail individuel », affirme Joël Volson, IDE et secrétaire général de la section Sud Santé. « Et puis nous savons bien que 7h36, c’est irréalisable, poursuit Sandrine Garandel. Il y aura toujours des dépassements et nous ferons 8 heures, comme avant… »
Pour manifester leur mécontentement, les grévistes ont donc occupé – depuis début juin – la cour d’honneur de l’établissement, ainsi que certains des bureaux de la direction, avant de se voir sommés par le tribunal administratif de Melun de quitter les lieux, ce mercredi 9 juillet. Malgré le déplacement du piquet de grève dans une autre cour du site, le climat ne semble pas apaisé. « Les méthodes de cette direction sont insupportables et vexatoires, s’insurge Joël Volson. On nous a annoncé ce passage aux 7h36 sans négociations, fin mai pour le 1er août; ensuite, on nous assigne devant le tribunal administratif trois fois, au prétexte que nous sommes des " occupants sans titre " de la cour d’honneur, alors qu’il s’agit de notre établissement et que nous n’empêchons personne de circuler. »
De son côté, la direction reproche aux grévistes d’avoir désactivé le logiciel patient, subtilisé des matelas dans des chambres, entravé l’accès pompiers aux logements des professionnels installés dans la cour d’honneur… « Je ne vois pas comment nous pourrions reprendre le dialogue après une telle confrontation », remarque Joël Volson.
Grève reconduite
Pour l’heure, le mouvement a été reconduit lors d’une assemblée générale, organisée le 9 juillet. Sous le barnum désormais installé directement sous les fenêtres de la direction, le planning du piquet de grève est complet pour la semaine à venir… « Notre espoir, c’est que d’autres hôpitaux suivent le mouvement, car nous savons bien que tout ça est décidé au-dessus, par des politiques d’austérité qui nous amènent à nous serrer la ceinture chaque jour un peu plus, alors qu’il y a de plus en plus de riches dans ce pays », se révolte Sandrine Garandel.
Sandra Mignot