Pour maintenir un bon contrôle glycémique, la prise en charge du patient diabétique de type 2 repose sur l’association médicaments, activité physique et équilibre alimentaire. L’ETP s’avérera fondamentale pour aider, au quotidien, le patient et son entourage.
Le diabète est un trouble de l’assimilation, de l’utilisation et du stockage du glucose apporté par l’alimentation. Le diabète de type 2 se caractérise par une baisse de sensibilité des cellules à l’insuline, ce qui en entraîne un besoin accru, auquel les cellules sécrétrices du pancréas finissent par ne plus pouvoir répondre.
Le diabète de type 2 est diagnostiqué par une glycémie supérieure à 1,26 g/l après un jeûne de huit heures et vérifiée à deux reprises. Il est en général découvert vers l’âge de 40-50 ans, par examen sanguin systématique. Un nombre important de patients diabétiques de type 2 entrent dans la maladie par le biais d’une complication : accident vasculaire cérébral, infarctus ou mal perforant plantaire. La découverte à un stade avancé s’explique par la progression silencieuse de la maladie à ses débuts. Un dépistage auprès de la population cible permettrait une détection plus précoce de la maladie.
Selon la Haute Autorité de santé (HAS), cette population cible est âgée de plus de 45 ans et se caractérise par un ou plusieurs de ces facteurs : le surpoids, avec un IMC égal ou supérieur à 28 kg/m2 ; la sédentarité ; un antécédent familial de diabète chez un apparenté du premier degré ; une origine non caucasienne et/ou migrante ; une anomalie de la glycorégulation ou prédiabète, avec une glycémie à jeun située entre 1,10 g/l et 1,26 g/l ; une hypertension artérielle traitée ou non traitée ; une dyslipidémie traitée ou non traitée ; une situation de précarité définie par un score Épices (1) supérieur à 30.
→ On distingue trois phases dans le développement du diabète de type 2 :
- un prédiabète se caractérisant par des anomalies de la glycorégulation avec une glycémie à jeun supérieure à la normale, comprise entre 1,1 et 1,26 g/l ;
- une phase infraclinique asymptomatique, pouvant durer une dizaine d’années pendant laquelle, en dehors de l’hyperglycémie, aucun symptôme ne laisse supposer l’existence de la maladie ;
- une phase clinique avec symptômes et complications chroniques microvasculaires et macrovasculaires.
→ Les altérations micro et macro-angiopathiques secondaires au diabète touchent le rein, l’œil, le pied, le système nerveux périphérique, l’appareil cardio-vasculaire, les dents et leur tissu de soutien.
Par comparaison à la population non diabétique, la mortalité, toutes causes confondues et à âge égal, est 1,5 à 2 fois plus élevée chez les personnes diabétiques pour les décès liés à une cardiopathie ischémique, une pathologie cérébrovasculaire ou une insuffisance rénale.
Le traitement médicamenteux est indissociable de l’observation de mesures hygiéno-diététiques.
Les antidiabétiques oraux sont préconisés le plus souvent dans le traitement initial de la maladie. Avec la progression de cette dernière, ils deviennent contre-indiqués en cas d’atteintes rénale, hépatique ou d’insuffisance cardiaque. Ces médicaments permettent une amélioration du contrôle glycémique. On distingue :
- les biguanides, comme la metformine, permettant d’augmenter la sensibilité à l’insuline ;
- les insulinosecrétoires, stimulant la sécrétion d’insuline : sulfamides hypoglycémiants ;
- les inhibiteurs d’alpha-glucosidase, diminuant la réabsorption du sucre au niveau intestinal.
Depuis quelques années, de nouvelles molécules sont apparues, permettant d’améliorer le contrôle glycémique en stimulant la sécrétion d’insuline via l’hormone incrétine (glucagon-like peptide-1/GPL-1). Il s’agit de molécules qui inhibent l’action de l’enzyme qui détruit l’analogue du GLP-1 (les gliptides) ou des molécules qui miment l’action du GLP-1 (analogues du GLP-1). Ces derniers présentent l’avantage de diminuer l’appétit et de réduire la vidange gastrique, ce qui permet de faire perdre entre cinq et dix kilogrammes aux patients.
Les analogues du GLP-1 s’administrent actuellement par injection, par stylo pré-rempli, sous forme journalière ou hebdomadaire. Des formes orales sont actuellement en cours d’expérimentation.
→ L’insuline lente est souvent préconisée après une dizaine d’années d’évolution chez les diabétiques de type 2, en association avec les antidiabétiques oraux. Son injection permet de contrer la baisse de sécrétion d’insuline par le pancréas. Cette insuline basale avait jusqu’à ces dernières années une durée d’action de vingt-quatre heures. De nouvelles insulines se sont développées (insuline Glargine U300, Toujéo, Sanofi - insuline Dégludec, Tresiba, NovoNordisk) avec une action se prolongeant jusqu’à trente-six ou quarante heures. Cela permet d’espacer les injections et d’avoir une plus grande souplesse quant à l’horaire de leur administration. Plus stables que les insulines moins récentes, elles minimisent le risque d’hypoglycémie, ce qui rassure les patients.
→ L’insuline rapide : avec l’avancée de la maladie et l’épuisement de la sécrétion d’insuline avec l’évolution du diabète, une insuline rapide doit être administrée à chaque repas. Elle remplace alors les antidiabétiques oraux. La quantité d’insuline à administrer est calculée en fonction de la glycémie enregistrée avant le repas et de la quantité de glucose absorbée. Cette injection d’insuline réalisée avant le repas présente le désavantage de ne pas être toujours adaptée à la prise effective de nourriture par le patient, qui peut ne pas ingérer la totalité de son repas ou, à l’inverse, manger plus qu’escompté.
Une nouvelle insuline rapide, la FIASP (Fast-acting insuline aspart) peut être injectée après le repas, ce qui permet au patient d’adapter parfaitement sa dose à sa quantité de nourriture. Autre avantage, psychologique : une insuline prise après le repas réduit la peur de faire une hypoglycémie. Cette possibilité ne doit évidemment pas constituer un prétexte pour dépasser sa ration alimentaire.
Autrefois réservée aux patients diabétiques de type 1 présentant une grande variabilité glucidique, elle est actuellement proposée dans le diabète de type 2. Elle permet une perfusion continue d’insuline adaptée aux besoins de chaque patient et reproduit une sécrétion d’insuline imitant le plus fidèlement celle secrétée par le pancréas. Se substituant aux injections, elle offre une plus grande liberté aux patients et une meilleure stabilisation de la glycémie. Son utilisation est amenée à se développer pour les patients diabétiques de type 2. Seule contrainte : elle doit être portée en permanence, y compris pendant le sommeil.
Comme il est précisé dans les recommandations de la Haute Autorité de santé (2014), « la prévention du diabète repose sur l’éducation nutritionnelle et une amélioration de l’hygiène de vie (activité physique, alimentation équilibrée réduite en graisses, réduction pondérale) et l’obtention d’un changement durable de ces comportements. » Ces préconisations, qui ont fait leur preuves en prévention, valent également une fois la maladie déclarée.
→ Alimentation : il est recommandé aux patients diabétiques de se nourrir comme l’ensemble de la population devrait le faire : trois repas par jour, avec un équilibre entre sucres rapides et lents, fibres, protéines et lipides. La consommation d’alcool doit être modérée et le grignotage à minimiser. « Aucun aliment n’est exclu, mais tout doit être réparti de manière harmonieuse, souligne la Pre Laurence Kessler, du service d’endocrinologie, diabète et nutrition des Hôpitaux universitaires de Strasbourg. Par exemple, si un diabétique veut déguster une tarte aux pommes, c’est possible, de temps à autre. On lui recommande alors de la manger à la fin du repas et non en dehors, afin qu’elle soit assimilée avec l’ensemble du bol alimentaire, ce qui évitera une hausse trop importante de la glycémie. »
→ Activité physique : pour les patients diabétiques de type 2, l’activité physique diminue la masse graisseuse, responsable de l’insulino-résistance, augmente la sensibilité de l’organisme à l’insuline (qu’elle soit secrétée par l’organisme ou injectée), permet une meilleure maîtrise de la glycémie, diminue la pression artérielle, le cholestérol et les risques de développer une maladie cardiovasculaire. Chez les personnes diabétiques, trente minutes d’activité physique quotidiennes sont recommandées, que ce soit en une ou en plusieurs fois. Comme le souligne Laurence Kessler : « L’activité sportive n’est pas une chose évidente à envisager, surtout pour des patients obèses, qui peinent à se déplacer et qui ressentent des douleurs articulaires. Il faut d’une part les encourager et les accompagner dans leur mise en mouvement et d’autre part, minimiser leurs douleurs, par l’administration d’antalgiques, si nécessaire. »
Des objectifs réalisables sont fixés avec les patients, en partant de l’évaluation de leur activité réelle. Un travail sur les représentations de l’activité physique est également à opérer : « Les patients imaginent qu’on leur parle de marathon ou de sport de haut niveau, alors que l’on se situe plutôt dans la mise en mouvement, précise la diabétologue. Aller chercher le journal à pied, monter les escaliers au lieu de prendre l’ascenseur, peuvent correspondre aux trente minutes d’activité physique requises. »
1- Évaluation de la précarité et des inégalités de santé dans les centres d’examen de santé.
ARTICLE RÉALISÉ AVEC LE CONCOURS DE : La Pre Laurence Kessler et Camille Walter, IDE, du service d’endocrinologie, diabète et nutrition des Hôpitaux universitaires de Strasbourg
Le diabète de type 2 atteint 90 % des patients diabétiques. Sa prévalence en France est de 4,5 %, ce qui représente plus de 3 millions de personnes. L’accroissement annuel du nombre de diabétiques est de plus de 6 % par an.
→ Le contrôle glycémique est nécessaire quand le patient est sous insulinothérapie. Chaque trimestre, la mesure de l’hémoglobine A1C apporte une vision tendancielle de la glycémie. Quotidiennement, il est recommandé aux patients de surveiller la valeur de leur glycémie avant le repas et deux heures après le début du repas, afin de vérifier qu’elle se situe dans les plages cibles fixées avec le diabétologue. Dans les faits, le rythme de l’autosurveillance est souvent allégé, comme le décrit Camille Walter, infirmière d’éducation au service d’endocrinologie, diabète et nutrition des Hôpitaux universitaires de Strasbourg. « Pour les patients traités par une injection d’insuline lente, souvent administrée le soir, nous leur proposons de réaliser un seul contrôle de glycémie capillaire, le matin à jeun. »
→ Les patients sous plusieurs injections d’insuline par jour, notamment avant les repas, peuvent employer des lecteurs de glycémie capillaires, ou des capteurs de mesure continue du glucose. Parmi ceux-ci, le Freestyle libre est depuis 2007 remboursé par la Sécurité sociale pour les patients diabétiques de type 2 devant effectuer au moins trois injections d’insuline quotidiennes. L’équipe du service d’endocrinologie, diabète et nutrition des Hôpitaux universitaires de Strasbourg a mené en 2018 une étude afin d’évaluer l’intérêt de la mesure continue du glucose par capteur chez des patients hospitalisés (Guardian Connect-Abbot). Cette possibilité de voir l’évolution de leur glycémie en temps réel permet aux patients de visualiser l’incidence d’une activité physique ou de leur prise alimentaire. 80 % des patients ayant participé à l’étude ont déclaré que ce dispositif leur était utile pour mieux comprendre les mécanismes de leur maladie et faciliter leur éducation thérapeutique.
Les patients diabétiques sont considérés comme “leur propre médecin”. Leur éducation est fondamentale, aussi bien pour surveiller leur glycémie que pour équilibrer cette dernière.
L’éducation centrée sur le patient
→ La bonne compréhension de la maladie et de ses enjeux est un élément capital de la santé du patient diabétique. Selon la Pre Laurence Kessler, du service d’endocrinologie, diabète et nutrition des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, « il s’agit pour nous de parvenir à leur faire comprendre que leur diabète sera considérablement amélioré, quel que soit son stade, avec une légère modification alimentaire, une petite mise en mouvement et une bonne prise médicamenteuse ». Or, les études montrent que 50 % des patients diabétiques ne prennent pas régulièrement leurs médicaments.
→ Camille Walter, infirmière d’éducation au service d’endocrinologie, diabète et nutrition des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, souligne l’importance d’une approche personnalisée, centrée sur l’écoute : « Même s’il est recommandé de manger trois fois par jour, tout le monde ne le fait pas. Il faut aborder avec le patient les contraintes de son quotidien, le travail, les habitudes alimentaires et prendre en compte ces éléments. » Le travail éducatif complémentaire avec une diététicienne s’avère essentiel afin de comprendre ce que contiennent les aliments et d’apprendre à lire leurs étiquettes.
→ Face à des patients qui peuvent se sentir en échec, éprouvant des difficultés à se plier aux contraintes imposées par leur maladie et ne parvenant pas à équilibrer leur diabète, les encouragements sont capitaux. « Nous sommes là pour les aider et non pour les juger, rappelle Camille Walter. Au cas par cas, nous valorisons le patient en lui montrant ce qu’il a déjà pu faire. Il faut également prendre en compte le fait que celui-ci n’a pas toujours envie de faire ce qu’on lui demande et qu’il va dire non. D’où l’importance de reformuler, discuter et l’intérêt de travailler en équipe multidisciplinaire. » Le recours à un psychologue ou à une assistante sociale peut s’avérer précieux pour accompagner les patients les plus fragiles dans la gestion de leur maladie.
→ Quant au patient sous insulinothérapie, il est important de lui apprendre à se servir d’un lecteur ou d’un capteur de glycémie et à effectuer ses injections. Les proches sont souvent associés à cette démarche et sollicités pour aider le patient. Leur connaissance de la maladie est aussi capitale en cas d’hypoglycémie. Si le patient n’est pas en état de se resucrer en ingérant 15 g de sucre rapide, c’est un aidant qui devra se charger de lui injecter une dose de Glucagon en intra-musculaire.
L’ETP du patient
L’ETP du patient demande un engagement de ce dernier et permet de prolonger l’éducation personnalisée. Le patient répond à un questionnaire portant sur ses activités, son mode de vie, son suivi glycémique, ses habitudes alimentaires, son environnement personnel. Une discussion complémentaire permet de discerner ce qu’il sait, ou ce qu’il pense savoir, sur sa maladie, en fonction des idées préconçues qu’il peut avoir. Puis l’infirmière établit un diagnostic pédagogique. Le patient effectue ensuite une sélection parmi les ateliers (diabète et famille, pied diabétique, insulinothérapie fonctionnelle…) qui lui sont proposés. Un programme pédagogique avec des objectifs personnalisés est ensuite établi, que le patient s’engage à suivre par la signature d’un contrat moral.