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Alors que les conséquences d’une chute sont dramatiques pour les personnes âgées, tant sur le plan physique, que psychologique et économique, rencontre avec Jacques Choque, éducateur sportif et auteur de Prévention des chutes des personnes âgées en institutions, le premier ouvrage sur cette problématique nationale.
Espaceinfirmier.fr : 2 millions de personnes âgées chutent chaque année en France : votre livre répond à un vrai sujet de santé publique !
Jacques Choque : Oui, c'est un sujet très préoccupant dont on parle peu alors que les conséquences sont très lourdes. Des décès (plus de 9000 par an !), bien sûr mais pas seulement : des fractures (bassin, col du fémur, poignets...) ou des entorses, un tassement vertébral… Mais aussi des conséquences psychologiques et sociales : peur de sortir, appréhension d'utiliser la salle de bain avec les conséquences sur le plan de l'hygiène et de l'image de soi que cela implique. On note également une augmentation de l'isolement et un renforcement du sentiment d'abandon. Enfin, les conséquences sont aussi l’hospitalisation et des interventions chirurgicales importantes qui représentent un coût financier énorme sans compter, souvent, une augmentation de la dépendance et une entrée en institution anticipée.
La prévention est le seul moyen d’éviter la chute : comment est née l’idée de ce nouveau livre ?
J.C. : En tant que moniteur (gym douce et yoga), j'encadrais des séances en résidences pour personnes âgées, et, en tant que formateur d'animateurs en activités corporelles pour personnes âgées, je me suis intéressé à la notion d'équilibre et au thème des chutes. Curieusement beaucoup d'études ont été menées sur le sujet mais aucun ouvrage n'avait été rédigé à ce jour. Je me suis donc attelé à cette tâche en essayant de traiter ce thème tant sur le plan théorique (causes, conséquences, les différents systèmes d'équilibration...) que pratique afin de construire des séances simples, efficaces : je propose plus de 200 exercices, classés par thème (renforcement musculaire, exercices d'équilibre...) ainsi que des tests et leurs évaluations.
Outre la bonne condition physique, vous insistez sur le confort du cadre de vie, l’alimentation, le loisir. Prévenir la chute résulte donc d’un ensemble de facteurs ?
J.C. : Prévenir les chutes c'est mettre en place un programme, qui, pour être efficace, doit se dérouler dans une optique multidisciplinaire. La prévention devra donc être diversifiée, ciblée. En effet, il faut à la fois intervenir en prévention sur des populations repérées comme étant à risque tout en essayant de réduire, dans le même temps, plusieurs autres facteurs de risques. Il sera donc nécessaire de mener des actions dans plusieurs directions : inciter les personnes à pratiquer des activités physiques ; mettre l’accent sur une alimentation de qualité, être vigilant sur les conséquences de la dénutrition, de la déshydratation ; être vigilant sur les risques de la polymédication ; porter une attention particulière aux risques liés à l’environnement immédiat, domestique, personnel et à l’environnement communautaire ; prendre en compte également les facteurs socio-économiques ; utiliser des tests fiables pour repérer les personnes à risques ; coordonner les actions de soins dans les établissements ; dispenser une formation de qualité aux encadrants ; adapter à chaque personne les exercices proposés Ce sont toutes ces propositions qui sont présentées dans ce guide pratique.
À qui destinez-vous cet ouvrage et, plus largement, que ce soit à l’hôpital, en Ehpad ou en maison de retraite, quels sont les personnels responsables de la prévention des chutes ?
J.C. : Inscrite dans le projet d’établissement, la prévention des chutes associe l’ensemble du personnel : l’engagement des responsables (directeur, médecin coordonnateur, infirmière coordonnatrice) qui doivent faire de ce problème un axe prioritaire ; l’adhésion de l’équipe soignante, motivée et formée ; la présence au sein de l’équipe de professionnels aux compétences diverses tel que kinésithérapeute, ergothérapeute, psychomotricien, éducateur sportif, diététicien, psychologue ; la coordination et l’engagement à long terme de tous ces intervenants en y incluant les familles ; la coordination des réseaux intégrant plusieurs partenariats, médical, associatif, sportif. Mais, en amont, avant l'entrée en institution, ce guide pratique peut intéresser aussi toutes les personnes encadrant des séances d'activités physiques, des ateliers "équilibre "au sein d'associations, de maisons de quartiers ainsi que tous les formateurs, les fédérations, les organismes privés ou publiques qui mettent en place des programmes de formation sur ce thème.
Propos recueillis par Emmanuelle Lionnet
Prévention des chutes des personnes âgées en institutions, Éditions Lamarre, mai 2017