Le rapport sur l'universitarisation des formations paramédicales a été rendu public hier. La mission Igas/IGAENR dresse un bilan plutôt positif de la réforme de la formation en soins infirmiers, mais se montre réservée sur la création de masters spécialisés.
Adaptation de la réingénierie, simplification de la gouvernance, vie étudiante, mode de sélection à l’entrée des formations initiales, poursuite des études post-diplôme... le rapport conjoint de la mission Igas-IGAENR (1) n'occulte aucune des questions que l'intégration des professions paramédicales au dispositif LMD peut susciter et formule pas moins de 33 recommandations sur la poursuite du processus.
Le rapport est très largement consacré à la formation infirmière, la première à mettre en place sa réforme à la rentrée 2009 et la seule à avoir une promotion diplômée avec le nouveau référentiel lorsque la mission a été diligentée par les ministères, en octobre 2012. Il salue le volontarisme de toutes les parties impliquées, l'amélioration du niveau de la formation théorique, l'approche plus réflexive du métier, l'homogénéisation de la formation et recommande qu’une évaluation de la qualité des infirmiers formés soit réalisée au bout d’au moins trois sorties de promotion.
Mener l'universitarisation à son terme
Quelques points de fragilité sont, néanmoins, signalés comme la crainte que l’universitarisation ne soit pas menée à son terme : « Toutes les unités d’enseignement de formation théorique ne sont pas encore assurées ou coordonnées par des hospitalo-universitaires, le contrôle des connaissances par l’université n’est pas toujours mis en place et la coordination des différents Ifsi reste à améliorer. Cette situation n’est pas anormale, compte tenu du travail considérable qu’a impliqué la réforme. (…) Toutefois, la mission a cru percevoir une certaine lassitude des acteurs originels de la réforme, sans que le relais paraisse assuré au sein de la communauté universitaire. » Une réflexion est recommandée sur la reconnaissance de la fonction de coordonnateur sur le plan indemnitaire, les hospitalo-universitaires n’étant, jusqu’à présent, pas rémunérés pour les heures de cours ou de coordination supplémentaires qu’ils fournissent…
Critiques sur les stages
Concernant les stages, les critiques fusent : les étudiants regrettent de ne pas passer suffisamment de temps en médecine-chirurgie-obstétrique alors que certains stages de 10 semaines dans des secteurs où il y a peu d’actes infirmiers leur paraissent trop longs. Côté formateurs, de sérieuses carences subsistent au niveau de l’usage du portfolio, et les plaintes sont légion concernant la difficulté à trouver des terrains de stage. La mission recommande de supprimer les rentrées décalées, qui compliquent l’organisation de la scolarité et d’introduire plus de souplesse dans l’organisation des stages en permettant à l'étudiant de changer de service ou d’être simplement rattaché à un pôle d’activité médicale.
Renforcer les droits des étudiants
Autre fragilité : d'une année sur l'autre, certains étudiants en soins infirmiers accumulent des « dettes de crédits » qu’il leur sera très difficile de récupérer. Il conviendrait donc de « rendre plus strictes les conditions de passage en année supérieure » et « d'assouplir les possibilités de redoublement ».
Par ailleurs, le rapport recommande l’alignement automatique du montant des bourses paramédicales sur celui des bourses sur critères sociaux du ministère de l’Enseignement supérieur. Il souhaite également que les « droits » des étudiants (services du Crous, accès aux bibliothèques, etc.) soient clarifiés dans les conventions tripartites signées entre région, établissements de santé et universités. Des contributions financières doivent être envisagées pour prendre en charge les surcoûts engendrés.
Une licence, et après?
La mission appelle à la reprise urgente des travaux de réingénierie. Mais, elle souligne combien il est regrettable que le grade universitaire soit considéré comme associé au niveau de rémunération. « Lier la revalorisation indiciaire des infirmières et l’accession à un grade universitaire portait en germe, dès l’origine, les revendications actuelles d’un rallongement systématique des formations, que ce soit au niveau du diplôme de base ou au-delà, sans que ces demandes soient nécessairement adossées à des besoins réels en matière de santé publique ». Qu'en sera-t-il pour les Iade, les Ibode, les puéricultrices ou encore les infirmières scolaires, qui réclament toutes un grade master ?
Pour l'Igas-IGAENR, le cursus LMD complet n'est pas la voie unique. La diversification des métiers se fera aussi par « l'expertise, la spécialisation, la pratique avancée, les nouveaux métiers, la recherche ». De même, le développement de la recherche paramédicale ne doit pas passer par la création de masters spécifiques aux professions, mais par des masters pluridisciplinaires.
Sandra Mignot
1- Inspection générale des affaires sociales (Igas) et Inspection générale de l’administration, de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR).