"Mesure phare" de la réforme des retraites, le compte personnel de pénibilité permettra aux salariés du privé exposés à des risques professionnels d’accumuler, à compter de janvier 2015 (1), des points pour changer de métier, réduire leur temps de travail ou partir plus tôt à la retraite.
Article mis à jour le 02/07/14, à 10h30: voir note de bas de page.
Depuis le 25 juin, on en sait un peu plus sur le dispositif qui doit, pour les salariés du secteur privé, compenser l’allongement de la durée de cotisation depuis l’entrée en vigueur, en janvier 2014, de la réforme des retraites. Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, et François Rebsamen, ministre du Travail, ont confirmé la mise en place, le 1er janvier prochain (1), du compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), dont l’objectif est double : contribuer à réduire la pénibilité du travail et les durées d’exposition et tenir compte de ces périodes dans la définition des droits à la retraite.
Travail de nuit
Manipulation de charges lourdes, exposition à un environnement agressif (bruit, températures extrêmes…), à des agents chimiques dangereux ou encore — et cela concerne particulièrement les infirmières (1) — travail de nuit ou en équipes successives alternantes… une dizaine de critères de pénibilité vont permettre aux salariés concernés, quelle que soit la nature de leur contrat (CDI, CDD, intérim...), d’alimenter leur compte personnel.
Chaque trimestre d’exposition à un facteur de pénibilité rapportera 1 point et les trimestres de poly-exposition 2 points, à concurrence de 100 points. Par exemple, une infirmière qui cumule au moins 120 jours de travail de nuit par an, verra son compte crédité de 4 points chaque année. Ces points pourront ensuite être convertis en temps de formation pour accéder à un métier moins exposé (2 points = 50 h de formation, 12 points = 300 h, 20 points = 500 h), à réduire le temps de travail (10 points = un trimestre à mi-temps avec maintien de salaire) ou à partir plus tôt à la retraite (10 points = un trimestre de retraite acquis). Ces deux dernières possibilités sont limitées à deux ans maximum, sachant que les 20 premiers points doivent d’abord être utilisés pour la formation professionnelle, car le dispositif "privilégie la prévention sur la réparation". A noter que les salariés proches de la retraite seront exemptés de cette obligation.
À l’appréciation de l’employeur
C’est à l’employeur « d’apprécier l’exposition moyenne de ses salariés sur une année au regard des conditions habituelles de travail ». Pour ce faire, il devra identifier les types de postes ou situation de travail susceptibles d'être exposés à partir de données collectives qui s’intègrent dans son document unique d’évaluation des risques. Pour ne pas être trop désavantagés, les salariés âgés de 59,5 ans au 1er janvier 2015 verront leurs points doublés jusqu’à la cessation de leur activité. Le coût du dispositif est estimé à 500 millions d'euros par an en 2020 et 2,5 milliards d'euros en 2040.
Françoise Vlaemÿnck
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1- Dans un entretien accordé aux Echos publié le mercredi 2 juillet, Manuel Valls a annoncé un report partiel du dispositif à 2016, en réponse à la menace de boycott de la conférence sociale des 7 et 8 juillet par les syndicats patronaux. Seuls quatre des dix critères de pénibilité, "les plus simples à mesurer", seront pris en compte dès 2015: travail de nuit, travail posté, travail répétitif, travail en milieu hyperbare.
2- Plus de 90 000 infirmières exerceraient dans un établissement privé ESPIC ou lucratif, selon les chiffres de la Drees.