Manif AP-HP 11 juin
© Caroline Coq-Chodorge
Les négociations piétinent entre les syndicats et la direction générale, qui reste ferme sur son projet de réforme du temps de travail. Un cortège de plusieurs milliers de manifestant a défilé jusqu'à l’Élysée.
Officiellement, la mobilisation à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris est en baisse, ce jeudi 11 juin : la direction estime à 21,5% le nombre de grévistes, contre 34% le 21 mai. C’est la troisième grande manifestation organisée par les syndicats de l’établissement depuis le début du mouvement de contestation contre le projet de réforme du temps de travail, voulue par le directeur général, Martin Hirsch. Dans la rue, un long cortège de plusieurs milliers de personnes s’est étiré de l’avenue Victoria –siège de l’AP-HP- au palais de l’Élysée. L’heure n’était visiblement pas à la démobilisation. Quelques petits cortèges venus de province et d’hôpitaux locaux franciliens ont même rejoint le mouvement.
Mais l’atmosphère était moins joyeuse. L’essoufflement, ou la colère, semble gagner les manifestants. « Je suis rassurée de voir autant de monde aujourd’hui. On a l’impression que, dans les hôpitaux, la mobilisation commence à redescendre un peu », témoigne Céline, IDE à l’hôpital Lariboisière.
Au niveau local, des actions sporadiques sont pourtant organisées presque chaque jour dans les 38 hôpitaux de l’AP-HP. Mais ils donnent lieu à des accrochages avec la direction, qui a des consignes de fermeté de la part du siège. Les affichages sauvages sont arrachés chaque jour, et réinstallés. À l’hôpital Beaujon (Clichy), la direction a fait appel à la police pour déplacer les matelas entassés dans le hall ; à l’hôpital Saint-Louis, le DRH a voulu fermer le self, devenu gratuit.
Le secrétaire général du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI-CFE-CGC), Thierry Amouroux, met en garde Martin Hirsch : « l’AP-HP est une cocotte-minute. Si on bloque la soupape, elle peut exploser. »
Céline a « l’impression que les manifestations ne changent rien, qu’il n’y a aucun dialogue ». Le 2 juin, Martin Hirsch a pourtant voulu relancer les négociations sur « une nouvelle base ». Mais elle ne comporte qu’une seule concession : le cadre de travail de 7 heures est exclu. Le directeur général propose de retenir celui de 7h30 –au lieu de 7h36 aujourd’hui-, qui inclut 15 jours de RTT, contre 18 RTT aujourd’hui.
Mais il ne fait aucune mention des deux jours de RTT extra-réglementaires, ainsi que des jours « médailles », qui récompensent l’ancienneté, ou le jour « fête des mères ». « Ce sont 5 à 9 jours de RTT qui seraient supprimés, selon les agents », explique Thierry Amouroux. Martin Hirsch veut également imposer la « grande équipe » de jour, dans laquelle les soignants travaillent indifféremment le matin ou l’après-midi. Il promet une meilleure visibilité des plannings et propose de tester ces nouvelles organisations d’ici septembre. Il promet aussi des compensations en termes de conditions de travail et d'embauche en CDD.
Pour Céline, « c’est du blabla. Des postes seront supprimés, nos conditions de travail ne vont pas s’arranger. Nous ne sommes pas contre une réforme du système, au contraire, mais pas sur le dos du personnel. Car nous avons l’impression d’avoir déjà beaucoup donné depuis cinq ans ».
Caroline Coq-Chodorge