Garches, le triste anniversaire | Espace Infirmier
 

07/08/2015

Et après…

Fermeture du service onco-pédiatrique de Garches, un anniversaire amer

Manifestations, grève de la faim, occupation de locaux, pétitions, échauffourées avec les forces de l’ordre… rien n’y a fait. Il y a un an tout juste, le 7 août 2014, l’AP-HP fermait définitivement les portes du service d’oncologie pédiatrique de l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches.

En quarante ans de carrière hospitalière, le Dr Nicole Delépine en a vu de toutes les couleurs. Elle a reçu louanges et soutien de pairs en France comme à l’étranger, tandis que d’autres jetaient opprobre et suspicion sur les résultats de ses travaux et approches thérapeutiques jugés contraires aux standards en vigueur. De ces derniers, elle n’en a cure. En femme de caractère, elle a toujours tenu le cap de ses convictions médicales, le plus souvent contre vents et marée.

Finalement, il n’y a que l’âge de la retraite, qu’elle aurait d’ailleurs volontiers reculé de quelques années, qui aura eu raison de son engagement professionnel et hospitalier. Le 18 juillet 2014, le Dr Delépine, cancérologue, spécialiste dans la prise en charge de l’ostéosarcome ou du sarcome d’Ewing, raccrochait donc la blouse et quittait son service. Non sans s’en avoir remué ciel et terre, alertant médias, responsables politiques, collègues et alliés, pour que ces patients puissent continuer de bénéficier du libre choix de leur praticien et du libre choix thérapeutique, un principe absolu pour lequel elle s’est toujours battue « et qui est inscrit dans le code de la santé publique », rappelle celle qui a toujours refusé de suivre les protocoles standardisés édictés par l’Institut national du cancer au profit de traitements éprouvés qui, selon elle, donnent de bien meilleurs résultats. Et même si, d’année en année, de transfert en transfert, le nombre de lits et les effectifs médicaux et paramédicaux de son service se réduisaient comme peau de chagrin. Un parcours que la pédiatre décrit dans un livre qui retrace l’histoire de ce combat singulier (1).

Aucune alternative

Des quatre enfants hospitalisés au moment de la fermeture du service, aucun n’a rejoint l’hôpital Ambroise-Paré à Boulogne-Billancourt où avait été transférée l’activité du service. Deux ont été accueillis à l’hôpital Paul-Brousse et deux adolescents ont regagné leur domicile. La douzaine d’infirmières qui travaillaient dans le service ont, quant à elles, été redéployées sur l’établissement et sur d’autres sites de l’AP-HP, indique la direction de la communication d’Ambroise-Paré.

Si plusieurs familles continuent le combat avec l’association Ametist (Aide aux malades en traitement individualisé en spécialité tumorale), plusieurs d’entre-elles sont en deuil à la suite du décès de leur enfant. « Je considère que ceux qui ont décidé et programmé la fermeture illégale de l’unité d’oncologie pédiatrique de l’hôpital de Garches sont responsables du fait que tout n’a pas été tenté pour sauver ma petite fille », dénonce ainsi Lucette Bordat, infirmière et grand-mère d’une fillette récemment décédée, dans une lettre ouverte adressée au président de la République et aux parlementaires. « Ametist a engagé une vingtaine de recours auprès de différentes juridictions à la suite de la fermeture de l’unité », indique Carinne Curtet, présidente de l’association. Pour l’heure, aucun jugement n’aurait été rendu.

De son côté, le Dr Delépine n’a pas déserté le front. « Je suis un peu comme un chef de gare. Je consacre une bonne partie de mon temps à répondre à des parents qui s’interrogent sur les traitements proposés à leur enfant. J’essaie de voir avec eux et les patients, quand ils sont adultes, quelles solutions on peut leur proposer en fonction de leur demande et de la situation, mais cela devient difficile. Et pour les enfants de moins de 15 ans, c’est désormais impossible. Hors des protocoles et des essais cliniques, il n’y a plus aucune alternative thérapeutique possible », déplore-t-elle. Et de conclure : « Tout cela c’est tragique. »

Françoise Vlaemÿnck

1- Neuf petits lits sur le trottoir, Éd. Fauves, 19 euros.

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