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Le directoire de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris a présenté lundi un plan d'action, suite au suicide en décembre du cardiologue Jean-Louis Mégnien. Sa souffrance au travail était connue des instances, qui veulent tirer des leçons de ce drame.
L’AP-HP est secouée par le suicide d’un cardiologue, Jean-Louis Mégnien, qui s’est défenestré du 7e étage de l’Hôpital européen Georges-Pompidou, le 17 décembre. Ce geste choque profondément mais ne surprend pas les familiers de ce professeur des universités – praticien hospitalier (PU-PH). Depuis 2013, Jean-Louis Mégnien était au centre d’un conflit lié à la succession d’une chefferie de service qui a dégénéré.
Loïc Capron, président de la commission médicale d’établissement (CME) de l’AP-HP, s’est personnellement investi sur le sujet, comme il l’a rappelé dans un message adressé le 24 décembre aux membres de la CME. En 2013 et en 2014, il a animé un groupe de quatre PU-PH qui a « rencontré Jean-Louis (Mégnien) et cherché avec lui des solutions pour remédier à sa souffrance au travail. Celle que nous avons mise au point avec lui consistait à l’extraire du Centre de prévention des maladies cardiovasculaires pour lui donner la possibilité d’exercer sa spécialité dans une structure rattachée au département de cardiologie ». Le suicide de Jean-Louis Mégnien signe le douloureux échec de cette tentative de médiation. De retour à l’HEGP le 14 décembre, après 9 mois d’arrêt de travail, il n’a pas pu entrer dans son bureau, dont la serrure a été changée.
Le directoire (http://www.aphp.fr/directoire) de l’AP-HP, qui entoure le directeur général Martin Hirsch, s’est réuni le 4 janvier. Dans un communiqué, il affirme « sa volonté pleine et entière que soient tirées toutes les conséquences de ce drame ». Une commission d’analyse des suicides a été mandatée et doit « mettre à plat les dysfonctionnements au sein de l’hôpital européen Georges-Pompidou ». Plus largement, le directoire regrette que « trop de situations de conflits interpersonnels s’enveniment à l’hôpital et nuisent durablement à la qualité des soins et à la qualité de vie au travail ».
Le directoire détaille ensuite son plan d’action. En matière de prévention, il prévoit de : « mieux prendre en compte les compétences managériales avant d’investir des praticiens de responsabilité », « mieux définir les responsabilités managériales qui incombent aux chefs de service et aux chefs de pôle », « entourer les procédures de nomination des chefs de service de davantage de garanties d’objectivité », « rétablir une durée limitée au mandat de chef de service », « renforcer la médecine de travail », et enfin « repenser la fonction ressources humaines pour les médecins».
Le directoire veut également améliorer « la détection et le traitement des situations conflictuelles » en mettant en place « un dispositif d’identification des situations à risque dans chaque groupe hospitalier », en se dotant « d’un vivier de personnes susceptibles d’intervenir en mission d’audit », et si nécessaire « faire appel à une médiation externe ». Des interventions qui devront être « suivies de décisions ».
En parallèle, la justice a ouvert une enquête préliminaire suite à la plainte pour harcèlement moral déposée par la veuve de Jean-Louis Mégnien, récemment élargie au chef d’homicide involontaire. Les membres du directoire « se tiennent à la disposition des enquêteurs » et appellent « tous ceux qui ont pu être concernés, impliqués ou informés, à faire de même », dans une démarche de « transparence ».
Caroline Coq-Chodorge