Essai clinique : une personne en état de mort cérébrale, 5 autres hospitalisées | Espace Infirmier
 

De g. à dr.: Marisol Touraine, Pr Gilles Edan, chef du pôle neurosciences, Véronique Anatole-Touzet, directrice générale et Benoît Vallet, directeur général de la Santé.

15/01/2016

Essai clinique : une personne en état de mort cérébrale, 5 autres hospitalisées

Marisol Touraine a diligenté deux enquêtes suite à cet accident grave survenu au cours du test d'une molécule par un laboratoire privé.

« C'est une situation inédite, un accident d'une gravité exceptionnelle », a souligné la ministre de la Santé, Marisol Touraine, dès le début de la conférence de presse qu'elle a tenue ce vendredi 15 janvier au CHU de Rennes. Six hommes âgés de 28 à 49 ans ont en effet été admis à l'hôpital pour des complications neurologiques suite à l'administration d'une molécule testée par le laboratoire privé Biotrial, situé à côté du CHU. Le premier patient, admis dimanche 10 janvier, est actuellement en état de mort cérébrale. « Son état s'est dégradé rapidement, a expliqué le Pr. Gilles Edan, chef du pôle neurosciences du CHU. Nous avons d'abord pensé à un AVC. »

Quatre autres personnes ont été admises depuis lundi et présentent des troubles neurologiques. « Pour trois patients, le tableau est sévère. On observe des lésions cérébrales nécrotiques et hémorragiques graves, dont certaines sont irréversibles , a détaillé le Pr. Edan. On ne peut pas actuellement poser de diagnostic définitif et comme la molécule était en phase de test, on ne connaît pas non plus son antidote. On tente de contrôler les réactions infectieuses par des corticoïdes. » Le sixième homme ne présente pas de symptômes mais est placé sous surveillance.

Doses les plus élevées

La molécule testée par Biotrial était en essai clinique phase 1 depuis juillet : il s'agit de la première administration de la molécule chez l'être humain, après la validation des étapes précédentes, qui comprenaient des tests sur les animaux et notamment les chimpanzés. Depuis juillet dernier, 90 volontaires en bonne santé ont accepté de recevoir des doses diverses de cette molécule, qui stimule le système endocannabinoïde pour lutter contre la douleur, des troubles de l'anxiété et des troubles moteur liés à des maladies neurodégénératives. Mise au point par le laboratoire portugais Bial, cette molécule n'était testée que par Biotrial à Rennes.

« La procédure de test est très encadrée, a souligné la ministre de la Santé. L'essai doit obtenir l'autorisation de l'Agence nationale de sureté du médicament (ANSM) et l'avis favorable d'un comité de protection des personnes. » Les six hommes concernées ont ingéré les doses les plus élevées administrées lors de cet essai, qui se déroulait dans les locaux de Biotrial, lors de prises répétées sur plusieurs jours entre jeudi 7 janvier et dimanche 10 janvier. Marisol Touraine, qui a rencontré les victimes et leurs familles au CHU ce vendredi, a tenu à exprimer son émotion face à leur détresse. « Je veux les remercier pour leur engagement dans cet essai et leur dire qu'ils n'ont pas à se sentir coupables », a-t-elle insisté.

Procédures judiciaires

Les 90 volontaires sont tous originaires de Bretagne et de Mayenne. Une liste complète de leurs identités a été transmises au CHU ce vendredi et tous seront contactés individuellement afin de pouvoir bénéficier d'une prise en charge et d'un suivi. Aucun autre cas d'effet secondaire néfaste n'est à ce jour connu. Le laboratoire a interrompu son essai le lundi 11 janvier. « J'ai engagé les premières actions dès que j'ai eu connaissance de l'affaire, a affirmé la ministre. L'ANSM a engagé une procédure d'inspection technique sur le site. L'Inspection générale des affaires sociales (Igas) devra vérifier le respect de la réglementation en vigueur. » Ces deux enquêtes sont indépendantes des procédures judiciaires engagées par le parquet de Rennes et le pôle de Santé publique du parquet de Paris.

Texte et photo: Lisette Gries


Mise à jour 20/01: Le patient en état de mort cérébrale est décédé dimanche 17/01; deux autres patients restent hospitalisés. "Sur les 84 autres personnes volontaires ayant été exposées à la molécule de l’essai, 18 personnes ont d’ores et déjà bénéficié d’un examen neurologique et d’une IRM cérébrale au CHU de Rennes. Les anomalies cliniques et radiologiques présentes chez les patients hospitalisés n’ont pas été retrouvées. 22 autres rendez-vous ont été fixés", expose le CHU de Rennes dans son point de situation du 19/01.

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