L'apprentissage, voie royale ?

Les apprentis infirmiers ne courent pas les couloirs des hôpitaux et cliniques. C'est même une espèce rare. La Fnapss ⁽¹⁾, qui regroupe 15 centres de formation d'apprentis (CFA) en France dont 9 dispensant la formation infirmier, en dénombre seulement 344 actuellement en cursus dans ses établissements adhérents. Opter pour l'alternance à partir de sa 2^e ou 3^e année de formation est pourtant possible depuis plus de vingt ans, à l'initiative de la Fédération de l'hospitalisation privée qui a créé les premiers CFA spécialisés. Mais aujourd'hui, la démarche reste encore confidentielle.

La pratique, l'atout majeur

À tel point que la région Lorraine vient tout juste de fêter le diplôme de sa première apprentie infirmière. Élodie Goult, 23 ans, étudiante en 3^e année à l'Ifsi d'Épinal, n'a pas hésité quand la possibilité de signer un contrat d'apprentissage avec la polyclinique de la ville s'est présentée, via le nouveau CFA Sant'Est. « L'apprentissage allait me permettre d'être autonome financièrement et de plonger sans attendre dans le grand bain », explique la jeune femme. L'étudiante a poursuivi sa formation à l'Ifsi avec le reste de sa promotion, mais en parallèle, elle est devenue salariée et a effectué pour son employeur 305 heures comme aide-soignante durant les week-ends et vacances scolaires, contre une rémunération mensuelle de 776 euros. « C'était une année enrichissante, souligne-t-elle. Je suis passée par tous les services de la clinique. Et même si je travaillais comme AS, j'étais toujours au contact des infirmières qui continuaient à me former. »

La pratique, c'est le grand atout de l'apprentissage. « Les employeurs ont compris l'intérêt de former leurs futurs salariés, qui auront acquis la culture de l'établissement et seront immédiatement opérationnels une fois leur diplôme en poche », confirme Corinne Déal, directrice générale de l'Adafoss ⁽²⁾ qui accompagne 200 apprentis infirmiers en Île-de-France. Parmi eux, Romain Roy, 26 ans, embauché à la clinique Ambroise Paré à Neuilly-sur-Seine. L'apprentissage était, pour cet ancien militaire, la seule chance de poursuivre sa formation qui n'était plus prise en charge financièrement. Mais trouver un employeur n'a pas été chose aisée. « J'avais le couteau sous la gorge, car j'approchais de l'âge maximum [26 ans, NDLR] pour signer un contrat, raconte-t-il. J'ai envoyé de nombreuses candidatures spontanées, en vain. C'est par le CFA que j'ai réussi à décrocher un entretien. »

Trop rares employeurs

À l'image des recrutements d'IDE, les embauches d'apprentis ont subi un sérieux coup de frein ces dernières années. « Nous avons beaucoup de candidats et du mal à trouver des employeurs, reconnaît Corinne Déal. Mais avec les départs à la retraite à venir, les recrutements vont reprendre. » En attendant, pour ceux qui ont pu intégrer le dispositif – grâce à de la motivation et un bon dossier scolaire (mieux vaut ne pas avoir de crédits à rattraper et avoir été assidu lors des précédents stages) –, l'apprentissage sécurise l'accès à l'emploi. Élodie Goult a accepté le poste qui lui a été proposé dans la foulée de son diplôme par la polyclinique. Romain Roy, lui, s'est engagé à travailler pendant deux ans pour l'établissement où il est apprenti. « Comme je connais bien la structure, que j'ai pu affiner mon projet au fil de mes stages et vacations, je devrais pouvoir choisir le service dans lequel j'évoluerai », précise le futur infirmier. Avant cela, il lui faudra décroché son diplôme. Presque une formalité pour les apprentis dont le taux de réussite à l'examen est de 98% en moyenne.

Clarisse Briot

(1) Fédération nationale pour l'apprentissage aux professions sanitaires et sociales

(2) Association pour le développement de l’apprentissage et la formation aux métiers sanitaires, sociaux et médico-sociaux