31/05/2016

Soignants et handicap : stop aux préjugés !

Celui qui prend soin peut-il être porteur d’une situation de handicap ? Oui, répondent en chœur la Fédération nationale des étudiants infirmiers et la Fédération hospitalière de France, qui tentent de battre en brèche les préjugés sur l’accès à la formation et à l’emploi paramédical.

"Être soignant et en situation de handicap, est-ce possible ?", interrogent Lisa Cann et Sébastien Rogeron, de la Fnesi, qui ont souhaité sensibiliser sur ce sujet mal connu lors du Salon infirmier.
Alors qu’une étude nationale (1) conduite par la FHF révèle que 51,9% des directeurs d’instituts de formation paramédicaux doutent que des étudiants en situation de handicap puissent devenir des professionnels soignants, les deux représentants associatifs ont tenu à rappeler que de nombreux handicaps "ne sont pas des contre-indications à l'exercice du métier" : surdité, certaines infirmités, dyslexie, dyspraxie, etc.

En réalité, le handicap dépend de l'environnement dans lequel évolue la personne. "Les lombalgies à répétition étaient devenues un handicap pour un chauffeur routier, illustre Lisa Cann, présidente de la Fnesi. Il s'est reconverti en infirmier. En station debout, sa pathologie n'est plus problématique."

Le concours d'entrée en Ifsi, une barrière infranchissable

Le parcours du combattant commence avant même l'entrée en formation. Convaincues que le milieu du soin n'est pas fait pour elles, les personnes en situation de handicap s’autocensurent. L'orientation des jeunes à l'école et des adultes dans le cadre de reconversions professionnelles est également défaillante.

Ensuite, le concours infirmier peut s'avérer "une barrière infranchissable". En effet, souvent par manque de moyens, les instituts de formation ne mettent pas ou peu de dispositions compensatoires en place lors des épreuves (2). Autre écueil une fois le concours en poche : obtenir le certificat d'aptitude, délivré par un médecin agréé qui ne connaît pas l'étudiant et peut difficilement évaluer ses capacités futures dans l'exercice soignant.

Au cours de la formation, les difficultés se poursuivent. Un seul Ifsi, celui de Castelnau-le-Lez (34), permet un accompagnement des étudiants en situation de handicap. Dans les autres, les mesures compensatoires sont très aléatoires, en raison d'une absence de financement identifié. Enfin, l'insertion professionnelle peut réserver des surprises. "Il y a une difficulté à assumer son handicap lors du recrutement et vis à vis de ses collègues, pointe Sébastien Rogeron. Sans compter les propos choquants que peuvent tenir certains professionnels dans les services !"

Un taux d'emploi de 5,34% dans la fonction publique hospitalière

Comment changer la donne ? En écho au récent livre blanc de la FHF consacré au sujet, la Fnesi avance des solutions. Il faut sensibiliser tous azimuts, à commencer par les employeurs publics, qui globalement, ne respectent pas l'obligation d'embaucher au moins 6% de personnels en situation de handicap. En 2014, la fonction publique hospitalière a atteint un taux d’emploi de 5,34%, correspondant « essentiellement à des situations de maintien dans l’emploi tandis que le recrutement direct ne concerne que peu le cœur de métier de l’hôpital », relève le livre blanc.

Il s'agit aussi de clarifier les modalités de financement des mesures compensatoires, afin qu'elles ne varient plus d'un institut à un autre, et proposer un accompagnement des étudiants en situation de handicap dans tous les instituts de formation.

Clarisse Briot


1- 243 instituts (essentiellement Ifsi et Ifas) ont participé à cette étude, menée par la société Eneis Conseil du 20 avril au 15 mai 2015.
2- Tiers-temps supplémentaire, accès à une salle isolée, interprétariat en langue des signes française, éclairage particulier, utilisation de documents en format modifié…

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