Qui veut perdre des millions ? | Espace Infirmier
 

05/10/2016

Qui veut perdre des millions ?

Un rapport de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France, dévoilé aujourd’hui par Le Canard enchaîné, pointe les errements financiers de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris. En 2011, l’institution a ainsi perdu la trace de 80 millions d’euros de créances.

L’affaire est révélée par Le Canard enchaîné du jour. Selon la chambre régionale des comptes (CRC) d’Île-de-France, qui a rendu en mai son rapport sur la gestion de l’institution entre 2010 et 2015, l’AP-HP aurait définitivement « perdu » 80 millions d’euros de créances. Une colossale boulette due à la bascule informatique du logiciel de gestion financière opérée en 2011, qui a écrasé les données de facturation et ainsi toute possibilité de relance auprès des patients.

La note serait même bien plus salée puisque les magistrats chiffrent la perte réelle à 138,5 millions d’euros mais soulignent qu’une partie était de cette somme « était juridiquement éteinte ». Ce n’est pas tout : chaque année, 45 millions d’euros de créances en moyenne ne seraient pas recouvrées. Par ailleurs, la CRC pointe le retard de déploiement du logiciel Orbis (dossier patient unique et partagé), qui aurait pourtant déjà couté la bagatelle de 130 millions d’euros à l’AP-HP.

Très chère directrice

On en apprend aussi de belles sur les émoluments de Mireille Faugère, qui a officié à la tête de l’établissement public de septembre 2010 à novembre 2013 avant de rejoindre… la Cour des comptes, en qualité de conseillère-maître. Grâce à un "courrier ministériel" d’octobre 2010, le salaire annuel de la directrice générale est passé de 200 000 euros brut annuels, salaire que percevait son prédécesseur et que perçoit son successeur, à 300 000 euros. Quelque 40 % d’augmentation en un trait de plume, les agents de la fonction publique hospitalière apprécieront le tour de force ! Ce d’autant que la Cour souligne que ce « traitement différencié » n’est pas « fondé sur une base réglementaire ». A son départ, l’ex-DG a également touché une prime de licenciement de 125 000 euros, au lieu des 25 881 euros auxquels elle pouvait légalement prétendre. Bref, en trois ans, ce traitement de faveur s’est chiffré à 530 000 euros.

Précieux conseils

À défaut d’en faire profiter les soignants, d’autres ont plutôt bien vécu des largesses de l’AP-HP. Ainsi, des officines de coaching et autres cabinets conseil qui gravitaient autour de la gouvernance sous l’ère Faugère ont perçu 3,7 millions d’euros pour délivrer leurs précieux avis ou des rapports hautement stratégiques, par exemple une analyse sur les parts de marché de chaque établissement de l’institution. Une étude pourtant produite chaque année — gratuitement — par l’Agence nationale d’appui à la performance. Sans compter que ces commandes ont été concédées de manière « irrégulière » en s’affranchissant des règles qui régissent les appels d’offres des marchés publics.

Enfin, alors que l’AP-HP avait passé un contrat avec le ministère de la Santé du Brésil pour former des médecins à la médecine de catastrophe, en vue de la préparation du mondial de foot en 2014, 230 000 euros, sur les 600 000 euros facturés, se sont envolés en billets d’avions -une quarantaine d’allers-retours en business class- entre la France et le pays de Pelé et des nuits dans des hôtels quatre étoiles.

Mais ça, c’était avant

Un peu gênée aux entournures, l’AH-HP a publié en début de matinée un long communiqué de presse. S'il ne dément pas les points soulevés par Le Canard enchaîné, il souligne que « la chambre régionale relève notamment la nette amélioration de la situation financière de l’AP-HP, l’absence d’emprunts toxiques et l’importance des réformes engagées par l’institution ».

L’AP-HP note également « que les principales critiques de gestion contenues dans le rapport (notamment des extinctions de créance liées à un changement de système d’informatique ; des conditions de rémunération de la directrice générale en dehors des règles du droit commun ; un recours excessif à des consultants) portent sur une période révolue et que des changements, reconnus par la chambre régionale des comptes sont intervenus dès la fin de l’année 2013". Quant à la perte des 80 millions d’euros, elle « doit s’apprécier au regard du volume de recettes annuelles de l’AP-HP (7,3 milliards d’euros)". Comme le souligne Le Canard, « et, pendant ce temps, le personnel compte chaque seringue et chaque compresse… »

Françoise Vlaemÿnck

Les dernières réactions

  • 06/10/2016 à 03:21
    solange granier
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    Et pendant ce temps le petit personnel continue de morfler !
  • 06/10/2016 à 19:02
    IPECA
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    ça donne juste envie de vomir... et elle craint quoi la dirlo ? Remarques, elle a de quoi se payer un bon avocat maintenant !
    Ecoeurant... Elle ne vaut même pas le temps que j'ai passé à écrire ce petit mot.
  • 07/10/2016 à 13:10
    Lauvia
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    Au pays des Donneurs-de-Leçons on n'aime pas entendre que chez le voisin ça marche mieux. Sinon on rate l'occasion de...donner des leçons!
    La corruption et la dilapidation des deniers publics, ça n'existe qu'au tiers monde.

    Vive la France!!

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