© Capture d'écran de la vidéo
Une campagne publicitaire, menée par l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), plaide pour une plus grande autonomie des IDE afin de répondre au problème d’accessibilité aux soins. Une vidéo qui n’a pas fait l’unanimité, surtout du côté des médecins.
« Pas toujours obligé de voir le médecin. Au nom de la santé des Québécois, qu’attend le gouvernement pour donner plus d’autonomie aux infirmières et infirmiers ? » En mettant l’accent sur l’expertise infirmière, ce spot publicitaire de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) revendique plus d’autonomie pour la profession. La vidéo (1) représente ainsi une infirmière qui ausculte un enfant, rapporte qu’elle « voit très bien ce que c’est », puis explique que le médecin viendra « voir ça dès qu’il aura une minute ». Mais le médecin ne vient pas...
« Notre publicité interpelle le gouvernement afin qu’il prenne les décisions qui transformeront l’organisation des soins de santé dans le but ultime de répondre aux besoins des patients, souligne Lucie Tremblay, président de l’OIIQ. Nous ne voulons plus que le Québec soit en queue de peloton en matière d’accès aux soins de santé ». Pour l’Ordre, l’expertise infirmière est une solution concrète aux problèmes d’accès. « Travailler en toute autonomie veut aussi dire en collaboration interprofessionnelle, ajoute la présidente. Il s’agit d’utiliser pleinement les compétences et le leadership infirmiers pour améliorer et favoriser l’accès aux soins de santé. »
Les médecins « choqués »
Mais pour le président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), Dr Louis Godin, il s’agit d’une publicité « outrancière » qui dépeint, selon lui, un portrait « fallacieux » et une situation « fort loin de la réalité quotidienne dans les cliniques médicales du Québec ». Et regrette, dans l'éditorial de la revue de la FMOQ, que cette publicité « oppose sans gêne médecins et infirmières » à un moment où ces professionnels de première ligne sur le terrain « font actuellement d'incroyables efforts pour améliorer l'accessibilité aux soins ». Et d’ajouter : « À l’ère de l’interprofessionnalisme, tout devrait pourtant unir les médecins et les infirmières. Il est donc dommage de voir l’OIIQ se poser en diviseur. »
Partager des compétences communes
Les propos tenus par le Dr Godin « préoccupent grandement » l’OIIQ. « Le but de notre message publicitaire n’est pas de froisser les médecins, mais plutôt de porter notre attention sur l’enjeu d’un meilleur accès aux soins, qui nous concerne tous, fait savoir Lucie Tremblay. Notre objectif n’est pas l’élargissement du champ d’exercice infirmier, mais bel et bien, d’occuper la pleine étendue de ce champ d’exercice. »
Du côté de l’Ordre national des infirmiers français, la vidéo est perçue comme « drôle et efficace » : « C’est plein de bon sens, soutient Karim Mameri, son secrétaire général. Aujourd’hui, les infirmières ont des compétences qui ne sont pas assez reconnues. Il ne s’agit pas de se substituer au médecin mais de partager des compétences communes. On se doit de les utiliser là où elles sont. Il ne doit pas y avoir d’exclusivité afin de faciliter l’accès à la santé. »
Pour le moment, le gouvernement québécois n’a pas pris position publiquement par rapport à la campagne de l’OIIQ.
Laure Martin
1. La première campagne a eu lieu du 17 octobre au 13 novembre dans les médias du Québec, puis de nouveau du 5 au 25 décembre 2016.