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Une petite dizaine d’infirmières du Centre hospitalier René Dubos de Pontoise (Ile-de-France) se sont mises en scène pour les besoins d’un calendrier. Objectif : dénoncer les restrictions budgétaires et la dégradation de leurs conditions de travail.
« Faut-il que l'on se mette à nu pour que vous vous intéressiez à nous ? » Cette question inscrite sur les dos de cinq infirmières du CH de Pontoise (95) dénonce la situation financière difficile que traverse l’établissement. « Elles ont souhaité faire ce calendrier pour soutenir l’action du syndicat », explique Yann Le Baron, secrétaire départemental de l’Union nationale des syndicats autonomes (Unsa) Santé Sociaux public et privé. Un mouvement social a en effet débuté le 17 septembre au CH de Pontoise et trois actions sont à venir : le 22 décembre, les représentants du syndicat se jetteront d’un pont du port de Cergy pour montrer que les autorités « nous poussent au bord du précipice », rapporte Yann Le Baron. Le 29, des banderoles revendicatives seront affichées dans l’hôpital, et le 5 janvier, au moins 5 membres du syndicat débuteront une grève de la faim illimitée « pour lutter contre la précarisation des emplois et la paupérisation des agents ».
C’est pour soutenir l’ensemble de ces actions que les infirmières ont décidé de se lancer dans la fabrication et la vente de ce calendrier. « Si, par exemple, l’un des agents de l’hôpital souhaite participer à la grève de la faim mais que cela a des conséquences sur son salaire, la vente du calendrier servira à en couvrir une partie, précise Yann Le Baron. En revanche, si la somme récoltée n’est pas utilisée, nous la reverserons à une association caritative. » Pour le moment, le syndicat a financé la réalisation de 500 calendriers, vendus 5 euros l’exemplaire. Parmi les autres messages, « une infirmière à six bras, bientôt cela ne suffira pas », une infirmière perfusée au café ou encore, derrière des barreaux de lit : « votre santé est en danger, la nôtre aussi »
Dégradation des conditions de travail
Pourquoi de telles mesures ? Parce que « la direction nous a annoncé un déficit de 9,5 à 10,5 millions d’euros pour 2016 auxquels s’ajoutent 4,5 millions d’euros pour 2015, explique Yann Le Baron. Le nouveau directeur doit donc mettre en place un plan de retour à l’équilibre ». Et d’après le syndicat, les dispositions prises par la direction, qui « affectent les salaires » et « les conditions de travail », devraient s’appliquer dès janvier : suppression de 2 h 30 hebdomadaires rémunérées en heures supplémentaires (soit une perte pour certains agents, dont les infirmières de nuit, de 300 à 400 euros par mois), arrêt du calcul du temps de travail en continu... Avec ces annonces, les agents ont reçu « un coup de massue », souligne Anne-Marie Hoarau, infirmière en réanimation médico-chirurgicale et trésorière adjointe de l’Unsa Santé Sociaux public et privé. Les décisions prises par la direction « vont mettre des agents dans la précarité », estime-t-elle.
Un CH hors les clous
C’est pourtant un tout autre discours que tient Alexandre Aubert, le directeur du CH arrivé en mai 2016, qui précise que « cet établissement est connu depuis des années pour être en dehors des clous au niveau de la réglementation et d’ailleurs, les deux derniers trésoriers ont été condamnés à payer des amendes ». Il s’agit également du seul établissement de France à ne pas avoir ses comptes certifiés. « Le CH est en difficulté financière pour de nombreuses raisons, ajoute-t-il. Paies, gestion des stocks mais aussi heures supplémentaires payées en trop. » Et cite pour exemple, le cas des infirmières de nuit : « Elles bénéficient d’un système organisé dans lequel elles ont la garantie de 130 heures supplémentaires par an dans leur emploi du temps. Ce n’est pas un problème pour moi, à partir du moment où les heures supplémentaires sont comptabilisées après qu’elles aient effectué leurs 32,5 heures hebdomadaires. Or, celles-ci étaient jusqu’à présent déclenchées à partir de 30 heures environ. » Et de poursuivre : « Personne ne va perdre 400 euros par mois, je ne suis pas fou ! Mais pour garantir des heures supplémentaires, il faut que l’on organise un déficit au niveau des ressources humaines. Or, les organisations syndicales ne sont pas forcément d’accord. »
Laure Martin