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Les infirmières françaises sont nombreuses à traverser la frontière pour travailler aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). L’Observatoire transfrontalier des personnels de santé, créé il y a un an pour analyser les flux transfrontaliers et identifier les besoins des deux pays, vient de publier sa première étude : 67 % des infirmières sont françaises.
35 % des diplômées aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) sont d'origine française, révèlent les statistiques tirées du bilan social 2014 de l'État de Genève : 67 % des infirmières et 37 % des aides-soignantes. Les 2 243 infirmières françaises recensées – dont 87 % résident en Haute-Savoie – assurent ainsi près des deux tiers des postes permanents aux HUG. Ce qui les attire ? En premier lieu, le salaire car « celui des infirmières suisses est 2,5 fois supérieur au salaire français », rapporte Isabelle de Turenne, chargée de mission Coopération transfrontalière à l’Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes. Mais pas seulement. « Les établissements savoyards expliquent aussi que la jeune génération de professionnels est plus difficile à fidéliser car ils veulent des postes dynamiques », ajoute-t-elle. De leur côté, les HUG, en manque de professionnels soignants, n’hésitent pas à embaucher.
Plus de transparence
L’Observatoire transfrontalier des personnels de santé (1) a été créé il y a un an dans un souci de lutter contre la pénurie transfrontalière dans une volonté commune d’analyser ces mouvements transfrontaliers. « Cette idée est partagée depuis environ dix ans, aussi bien du côté suisse que du côté français, afin d’étudier les flux de personnels de chaque côté de la frontière, notamment parce que le turn over est très important dans les établissements français », explique Isabelle de Turenne. L’Observatoire, qui analyse le fonctionnement de plusieurs établissements français et suisses (2), retrace le parcours des professionnels de santé et identifie les besoins des deux régions pour ainsi lutter contre la pénurie de soignants.
Les établissements ont d’ailleurs pris des mesures afin d’éviter l’accroissement du déséquilibre. Du côté français, elles visent principalement à fidéliser les infirmières en proposant, dès la formation des stagiaires, l’attribution d’une allocation d’études - 800 euros par mois pendant deux ans maximum - en contrepartie d’exercer dans l’établissement pendant la durée de l’allocation versée, une formation qualifiante pour les faisant-fonctions d’aides-soignantes et cadres de santé, ou encore, des actions internes d’accompagnement à la prise de poste.
Du côté genevois, les HUG ont dû adapter leur politique de recrutement en raison de la mise en application de la préférence indigène. Ainsi, pour toute embauche étrangère, l'hôpital universitaire doit désormais obtenir une attestation de l’office cantonal de l’emploi qu’aucun candidat suisse n’est en recherche d’emploi sur le poste à pourvoir. Les HUG ont également doublé leur capacité de formation d’infirmiers en trois ans (de 80 places à 150 places aujourd'hui) afin d’augmenter leur autonomie. Et pour suppléer les infirmières manquantes dans certains actes techniques, deux nouvelles qualifications intermédiaires ont été créées : assistant en soins et santé communautaire et technicien de salle d'opération (3). « Si les HUG prévoient de recruter une infirmière française, nous leur avons également demandé de prendre contact avec l’établissement d’origine afin qu’ils conviennent d’une date de départ de l’IDE afin que celui-ci ne soit pas pénalisé », précise Isabelle de Turenne.
Laure Martin
1. Créé sous l’égide de la Commission santé du comité régional franco genevois, par le Département de l’emploi, des affaires sociales et de la santé (DEAS) du canton de Genève et l’Agence régionale de santé Rhône-Alpes.
2. Les HUG pour la Suisse, et pour la France, Centre hospitalier d’Annecy, Centre hospitalier de Contamine-Findrol, Centre hospitalier de Sallanches, Centre hospitalier de Thonon, Centre hospitalier de La Roche-Sur-Foron et Reignier.
3. 97 postes d’ASSC (qualification supérieure aux aides-soignantes) ont été créés aux HUG. Une vingtaine seront probablement ouverts au 1er semestre 2017. Quatre techniciens de salle d'opération (qualification émergente) sont en activité et une dizaine seront engagés en 2017.