© Fotolia
Un constat ce 8 mars, journée internationale des droits des femmes : l’écart salarial entre hommes et femmes demeure un marqueur saillant des inégalités entre les sexes. Fortement féminisée, la profession infirmière n’échappe pas à cette « règle ».
170 ans – au plus tôt –, c’est le temps qu’il faudra pour que l’égalité de salaires entre les hommes et les femmes soit atteinte, selon une estimation du Forum économique et social. Autant dire que ce n’est pas pour demain… En attendant, l’écart salarial entre les deux sexes demeure bien ancré dans les pratiques. Ainsi, au niveau mondial, lorsqu’un homme touche un dollar de salaire, une femme ne perçoit « que » 59 centimes « malgré un temps de travail moyen plus long ». Un constat navrant qui peut s’apprécier comme une illustration sexuée du « travailler plus pour gagner moins. »
Et en France ? Si le gap est moindre, il existe bel et bien, et persiste d’année en année. En 2012, selon une étude de la Dares (Direction de l’animation et de la recherche, des études et des statistiques), publiée en novembre 2015, la différence de salaire entre un salarié et une salariée – occupant un même poste – s’établissait à + 25,7 % en faveur du salarié. Si « cet écart s’explique pour partie par le temps de travail des femmes, souvent plus fractionné et davantage à temps partiel » comme le souligne la Dares, l’examen du salaire horaire net entre hommes et femmes révèle toujours une disparité salariale de -16,3 % au détriment des femmes. Les infirmières n’échappent pas à cette discrimination rampante même si, avec un écart de salaire de - 7 % entre les unes et les autres, l’inégalité salariale est nettement moins marquée que dans la population générale.
« À qualification et diplôme équivalents, les professions majoritairement féminines sont toujours moins bien considérées et, de fait, toujours moins bien valorisées sur le plan salarial que celles typiquement masculines ou mixtes, explique Jean Vignes, secrétaire général Sud santé sociaux. Par ailleurs, les femmes ont aussi plus de difficultés à accéder à des formations longues, ce qui freine l’évolution de leur carrière. » À tel exemple, que plus l’on monte dans la hiérarchie hospitalière, moins les femmes sont proportionnellement présentes. Du côté des infirmières libérales, point d’inégalité de revenus puisque hommes et femmes sont rémunérés à l’acte. Cependant, comme l’indique Catherine Kirdinis, présidente du syndicat national des infirmiers et infirmières libéraux (Sniil), « les infirmières étant aussi souvent mamans, elles font le choix de moins travailler pour s’occuper des enfants et cette situation engendre au final un écart de revenus entre hommes et femmes ». « Un choix » qui se paye cash la retraite venue, puisque salariées et libérales ayant moins cotisé durant leur carrière, leurs pensions sont de facto plus faibles que celles de leurs collègues masculins.
Dans les pas des femmes islandaises qui ont initié le mouvement, l’association féministe Les Glorieuses appelle depuis quelques années les salariées à cesser le travail chaque 7 novembre à 16 h 34 précisément. Symboliquement, cette date et cette heure marquent le moment, où au regard de la persistance des inégalités de salaires, les hommes ont déjà gagné ce que les femmes percevront durant l’année… Heureusement, le 3 mars dernier à la tribune du parlement européen, Janusz Korwin-Mikke, député européen polonais, et sympathisant d’extrême droite, a trouvé une explication de haute volée politique et intellectuelle pour justifier le moindre salaire des femmes par rapport à celui des hommes : « Parce qu'elles sont plus faibles, plus petites, moins intelligentes. Elles doivent gagner moins, c'est tout. » Finalement, 170 ans ne seront peut-être pas de trop…
Françoise Vlaemÿnck