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Dans une lettre ouverte diffusée le 6 avril, les médecins guyanais interpellent le Premier ministre, Bernard Cazeneuve, sur l’insuffisance des moyens proposés pour l’offre de soins en Guyane. Une « urgence sanitaire » estiment-ils.
Les médecins du Centre hospitalier de Cayenne, ceux du CH de l’Ouest Guyanais ainsi que les médecins libéraux et le collectif « pou La gwiyann dékolé » se disent « indignés » par le niveau des aides que le gouvernement s’engage à prendre afin de donner un nouveau départ au centre médico-chirurgical de Kourou et au CH de Cayenne. Selon eux, la Guyane accuse un « retard structurel d’environ 30 ans » dans le domaine de la santé. « La Guyane, deuxième plus grand territoire de France par la taille et la croissance démographique, est pourtant un vaste désert médical », alertent-ils dans leur courrier. Et ce, bien que « les professionnels se battent jour et nuit pour offrir des soins de qualité à une population ayant perdu toute confiance dans son système de santé ».
Les professionnels de santé dénoncent le « déficit criant de structures médico-sociales, de spécialités médicales et chirurgicales tant dans le domaine public que libéral. Les hôpitaux sont vétustes, sous-équipés, les plateaux techniques insuffisants. » De plus, de nombreuses spécialités sont absentes : « pas de neurochirurgie, de réanimation pédiatrique, de chirurgie thoracique et vasculaire, d’hématologie ou de médecine nucléaire ». À défaut de plateau technique complet, les établissements doivent organiser plus de 300 évacuations sanitaires tous les ans, ce qui coûte des dizaines de milliers d’euros. Un manque de moyens générateur de problèmes sanitaires en raison de difficultés pour la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux, de certains infarctus du myocarde ou du suivi des enfants exposés in utero au virus Zika lors de l’épidémie de 2016.
Les médecins estiment donc que les propositions faites le 5 avril par le gouvernement « sont dérisoires par rapport aux besoins » : « ous proposez pour l’ensemble des hôpitaux publics 85 millions d’euros pour l’investissement futur et éponger la dette fournisseur, alors que le coût d’un nouveau bâtiment médico-technique est estimé, à lui seul, à 120 millions d’euros », rappellent-ils. Ils interpellent également le Premier ministre sur l’absence de revalorisation des missions d’intérêt général (MIG) et de réponse « concernant l’attractivité médicale, et notamment pour les médecins libéraux ». Les praticiens réclament une aide pour acquérir les prérequis en termes de spécialités et de technicités qui permettront « la naissance d’un CHU guyanais, ce qui est important tant pour le corps médical que pour la population ». Avant de terminer : « Monsieur le Premier ministre, si vous estimez que notre requête est illégitime, nous vous invitons à venir vous faire soigner chez nous, en Guyane Française, département de la République. »
Laure Martin