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Prix des médicaments anticancéreux, molécules en développement et attendues sur le marché, innovations coûteuses et impact sur notre système de santé… Publiée par l’Institut national du cancer (Inca), une étude relative au prix des médicaments anticancéreux prévoit une « évolution très forte » des coûts dans les deux ans à venir.
« Les cancers sont la première cause de mortalité en France », rappelle l’Institut national du cancer (Inca) dès l’introduction de son étude sur le prix des médicaments anticancéreux. Et le nombre de nouveaux cas est en hausse : en 2015, 385 000 nouveaux de cancers recensés en France contre 355 000 en 2014 (1), et 149 500 décès, contre 148 000 en 2014.
En 2014, 147 564 patients ont été traités par un anticancéreux, note l’étude. Les dépenses totales des établissements des secteurs privé et public confondus ont représenté 2,87 milliards d’euros, dont 55,7 % pour les médicaments anticancéreux. Dans le secteur public, 10 molécules sont responsables de 90,2 % (soit 1,079 milliard d’euros) des dépenses d’anticancéreux : bevacizumab, rituximab, trastuzumab, pemetrexed, bortezomib, cetuximab, ipilimumab, azacitidine, cabazitaxel et pertuzumab). Dans le privé également, 10 molécules représentent 375,9 millions d’euros, soit 93,8 % des dépenses : bevacizumab, trastuzumab, cetuximab, pemetrexed, rituximab, cabazitaxel, panitumumab, doxorubicine, pertuzumab et eribuline). Et « en médecine de ville, en 2015, 45 698 patients ont reçu une thérapie ciblée orale et 14 456, une hormonothérapie de nouvelle génération, pour un coût respectivement de 753,2 millions d’euros et de 230 millions d’euros », poursuit l’Inca. Une « escalade des prix » devenue « la norme » alors que « ceux-ci apparaissent en partie déconnectés du gain thérapeutique apporté ». Et si les innovations en cancérologie se sont succédé « à un rythme soutenu », « le mécanisme a pu conduire à des prix élevés ». Ce que l’Inca explique notamment par le coût unitaire particulièrement élevé, les prises médicamenteuses au très long cours, ou encore, les rachats par de nouveaux laboratoires pharmaceutiques.
En s’appuyant sur l’horizon scanning public de Birmingham, les retours du congrès international de l’Asco (American society of clinical oncology) 2016, les informations des sociétés savantes et les recommandations établies par l’ANSM (agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé), l'Institut national du cancer a étudié les perspectives d’évolution des prix des médicaments anticancéreux sur deux ans. Ainsi, « des évolutions très fortes sont à prévoir » car 89 molécules, identifiées dans les pipelines, « pourraient recevoir dans les deux prochaines années soit une autorisation de mise sur le marché soit une extension d’indication, touchant les cancers aux très fortes incidences ».
Par ailleurs, de nouvelles classes de médicaments anticancéreux (dans les cancers du sein, du poumon, du colon-rectum, de l'ovaire, les mélanomes et le myélome multiple) et thérapies ciblées ainsi que l'immunothérapie spécifique (développement concernant les CAR-T,des lymphocytes T génétiquement modifiés) administrée au long cours sont attendues. « Ces traitements (...) sont susceptibles d’impacter fortement les dépenses et de bouleverser l’organisation des soins dans le domaine de l’oncologie », peut-on lire. On estime à 26 000 personnes la population cible de ces traitements. Et au vu de ces évolutions, l'Institut s'interroge sur « la capacité des systèmes de protection sociale français à maintenir un accès à l’innovation et aux meilleurs traitements pour tous les patients ».
Sandrine Lana