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Dans son ouvrage « Immunisés ? Un nouveau regard sur les vaccins », Lise Barnéoud, journaliste scientifique indépendante et mère de famille, livre une enquête sur la pertinence des vaccins et en rappelle les bases. Un débat toujours d’actualité.
Votre ouvrage « interroge la place et le rôle des vaccins dans la société ». Avec la polémique des 8 nouveaux vaccins obligatoires à partir de janvier 2018, comment expliquer la méfiance de la population face aux vaccins ?
Je pense qu’il est important de relativiser les enquêtes sociologiques menées sur cette question. Par exemple, pour parler de cette « méfiance » des Français, on cite souvent l’étude Vaccine confidence projet, publiée l’an dernier, et qui posait la question suivante : « Pensez-vous que globalement, les vaccins sont sûrs ? » Cette question est bien trop générale ! Aujourd’hui, beaucoup se posent des questions sur la sécurité des vaccins. Et cette méfiance vient du fait que ces interrogations ne trouvent pas de réponse transparente et apaisée. À mon sens, le gros problème vient d’un manque de pédagogie et d’information, d’accepter de rentrer dans cette complexité. Les parents ont envie de comprendre et ne plus d’obéir aveuglément. Et pour comprendre, il faut se pencher vaccin par vaccin et leurs enjeux propres.
En quoi est-ce important ?
Chaque vaccin a des avantages et des inconvénients distincts. Par exemple, ce n’est pas la même chose de se faire vacciner contre la diphtérie – bien qu’étant le seul moyen de prévention, la vaccination n’a aucun impact sur la transmission de cette bactérie – ou la varicelle pour laquelle des études ont montré qu’il n’y a pas d’avantage, ni à l’échelle individuelle ou collective, de se faire vacciner. Ce n’est pas parce qu’un produit est estampillé « vaccin » que c’est la solution idéale. Il faut garder une posture critique. Car un vaccin est un médicament. Pour ce qui est des onze vaccins obligatoires à partir de 2018, il s’agit là de vaccins sur lesquels on a beaucoup de recul et pour lesquels les bénéfices risques sont les mieux connus.
Pensez-vous qu’aujourd’hui, refuser un vaccin, c’est aller à l’encontre du progrès ou du souci d’autrui ?
Pas nécessairement. On ne peut pas généraliser. Prenez les 3 vaccins qui sont aujourd’hui déjà obligatoires (diphtérie, tétanos et poliomyélite). Ils n’ont aucun impact sur les autres, sur la protection collective ou la solidarité. Ces vaccins ne protègent que le vacciné. D’ailleurs, il faut souligner ce grand écart entre le discours des autorités de santé publique qui insistent sans cesse sur cette dimension collective et a contrario nos lois qui favorisent les trois vaccins les plus égoïstes du calendrier vaccinal. Il faut sortir de cette posture de jugement et être dans la pédagogie, dans l’information, dans du factuel.
Les professionnels de santé, qu’ils soient en ville ou à l’hôpital, médicaux ou paramédicaux, ont-ils un rôle à jouer dans cet échange d’information ?
Leur rôle est primordial. Ils doivent considérer toute interrogation comme légitime et prendre le temps – même si ce n’est pas toujours facile – d’entrer dans les explications, vaccin par vaccin. On peut, par exemple, imaginer une consultation dédiée aux vaccins directement à la maternité ? Il faut faciliter l’accès à l’information, de façon à ce qu’un parent ou un soignant puisse, en quelques clics, trouver des informations objectives et chiffrées. Les professionnels du soin doivent être, à leur tour, accompagnés par les messages des autorités de santé publique qui, elles aussi, ne doivent pas balayer d’un revers de la main toutes ces interrogations. Il est impossible aujourd’hui d’affirmer que la vaccination, ça ne se discute pas.
Propos recueillis par Karen Ramsay