23/10/2017

Tiers payant : Agnès Buzyn cède aux médecins libéraux

La ministre de la Santé renonce à l’obligation du tiers payant prévue au 30  novembre, jugée « irréaliste » par l’Inspection générale des Affaires sociales (Igas). Mais elle prend ainsi le risque d’une « démobilisation des acteurs ».

Les syndicats de médecins libéraux, majoritairement hostiles à la généralisation du tiers payant, crient victoire. La ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, a fait le choix d’enterrer la généralisation du tiers payant, prévue le 30 novembre prochain par la loi Santé de 2016. « Nous ne sommes pas prêts techniquement à l’étendre », a-t-elle déclaré le 22 octobre au Journal du Dimanche. Avant de préciser : « Nous tiendrons l’engagement du président de la République de rendre le tiers payant généralisable ». « En clair, le tiers payant restera possible mais ne deviendra pas obligatoire », explicite le premier syndicat de médecins libéraux, la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF).

Pour étayer cette décision, Agnès Buzyn s’appuie sur le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur l’« Évaluation de la généralisation du tiers payant », réalisé à sa demande et rendu public le 23 octobre. Les inspecteurs de l’Igas jugent ainsi la généralisation « irréaliste » au 30 novembre. Trois professions de santé accusent, en effet, un sérieux retard dans leur pratique : les chirurgiens dentistes (seuls 20 % des actes en tiers payant), les médecins généralistes (35 % des actes en tiers payant), et tous les médecins spécialistes en dehors des radiologues (40 % des actes en tiers payant).

Des pratiques très diverses

Deux scenarii sont proposés à la ministre : d'une part, « la suppression de l’obligation », et d’autre part, « le report de l’obligation à 2019 », mais seulement sur la part obligatoire. Agnès Buzyn a ainsi choisi le premier scenario, passant outre la mise en garde de l’Igas sur le « risque de démobilisation des acteurs », alors que leur mobilisation est pourtant « nécessaire ».

L’état des lieux, réalisé par l’Igas, révèle des pratiques très diverses selon les professions de santé. Dans l’ensemble, le tiers payant est pratiqué sur 92 % des actes, mais ce taux est porté par la pratique presque généralisée du tiers payant dans les pharmacies, qui facturent beaucoup d’actes. Le tiers payant « historique », pratiqué pour les patients bénéficiaires de la CMU, est presque généralisé, à près de 99 %. L’Igas relève une progression importante du tiers payant rendu obligatoire en 2015 pour les bénéficiaires de l’Aide à la complémentaire santé (99 %), les patients en affection longue durée (98,6 %), et la maternité (90 %). Mais là encore, les généralistes, les dentistes et les spécialistes accusent un fort retard.

Le tiers payant pour le reste de la population n’a presque pas progressé entre janvier 2015 et juin 2017, même sur la part obligatoire. Seuls 10 % des dentistes et 20 % des généralistes le pratiquent, contre 93 % des infirmiers. Le processus du tiers payant sur la part obligatoire est pourtant « rapide, fiable et simple » grâce à la carte vitale, note l’Igas. Celle-ci reconnaît en revanche des « freins techniques » dans la pratique du tiers payant sur la part complémentaire. Le tiers payant intégral (part obligatoire et complémentaire) n’est pratiqué que par 3,9 % des dentistes ou 6,5 % des généralistes. Mais il n'est pas impossible, puisque il est pratiqué par 75,5 % des infirmiers !


Au final, pour l’Igas, le principal frein au développement du tiers payant sur la part obligatoire « n'est pas de nature technique mais tient à une confiance encore trop fragile des professionnels de santé ». Sur la seule part obligatoire, elle estime que la généralisation est réalisable « à brève échéance sous réserve que soit mis en œuvre un accompagnement renforcé des professionnels de santé ». Ce n’est pas le choix de la ministre de la Santé.

Caroline Coq-Chodorge

Les dernières réactions

  • 23/10/2017 à 19:42
    blaise
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    On vit dans un monde merveilleux...
  • 25/10/2017 à 18:38
    patbianco
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    ayant adhérer au TP intégral pour plus de faciliter avec mes collègues , j ai du perdre 10000 € au profit des mutuels .
    j ai décidé de faire volte face , plus de tiers payant avec ces enfoirés de mutuels
  • 26/10/2017 à 14:13
    La Rédaction, Autre
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    Patbianco : En vue d'un prochain papier sur le sujet, seriez-vous partant pour témoigner (de façon anonyme si vous préférez) ? Contactez-nous : karen.ramsay@initiativessante.fr
  • 26/10/2017 à 22:19
    patbianco
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    Pas de soucis
  • 26/10/2017 à 22:25
    patbianco
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    Tenez pour exemple courrier de 2013:
    "Madame,
    Nous vous contactons pour vous faire part de notre mécontentement , en effet nous effectuons des soins chez une de vos sociétaires depuis le 10/05/2012, cette personne ayant des difficultés ne nous règle p
  • 27/10/2017 à 09:31
    La Rédaction, Autre
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    Patblanco : vous m'avez envoyé un mail pour que la journaliste puisse vous en parler directement ?

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