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L’hôpital, bientôt une zone sans-tabac ? Si le décret du 15 novembre 2006, applicable au 1er février 2007, interdit formellement de fumer dans les établissements de santé, le personnel hospitalier ne lâche pas pour autant la cigarette. À la veille du lancement du mois sans tabac, le Réseau de prévention des addictions (Respadd) fait le point.
De la théorie à la pratique. Comment devient-on un hôpital sans tabac ? Quelles sont les stratégies à mettre en place pour mobiliser les professionnels de santé ? Comment les engager durablement dans la lutte ? Autant d’éléments abordés lors de la journée organisée à Paris le 24 octobre, par le Réseau de prévention des addictions (Respadd) qui a révélé les résultats d’une enquête (1) réalisée auprès de 500 établissements de santé, ayant trois objectifs : mesurer l’état d’avancement des actions mises en place dans chaque établissement, situer celui dans la politique anti-tabac, et dégager des axes d’amélioration. 155 directeurs y ont répondu, en indiquant le respect – ou non – des huit recommandations de bonnes pratiques d’une politique Hôpital sans tabac (HST).
Norme 1 : Gouvernance et engagement
> L’établissement de santé a toute autorité pour la mise en place d’une politique anti-tabac.
Ce que révèle l’enquête ? 16 % des répondants estiment que la politique anti-tabac n’exclut pas de facto des collaborations avec l’industrie du tabac. Et seul 1 établissement sur 5 désigne un cadre référent chef de projet.
Norme 2 : Communication
> Une stratégie de communication pour sensibiliser et appliquer la politique anti-tabac et promouvoir les services de tabacologie/addictologie.
Ce que révèle l’enquête ?
42 établissements (27 %) n’informent pas leurs collaborateurs de la politique HST. Et si 50 % des répondants disposent de supports spécifiques pour toucher des publics cibles, l’information des usagers n’est pas systématique dans plus de 50 % des établissements.
Norme 3 : Formations initiales et continues
> Une formation initiale et continue adaptée à tout le personnel, soignant ou non soignant.
Ce que révèle l’enquête ? Seuls 19 % des établissements ont formé le personnel aux premiers conseils et mesures d’accompagnement de la dépendance, et 23 % ont formé les cadres aux techniques de motivation à l’arrêt du tabac.
Ce qu’elle propose ?
Encourager la participation de tout le personnel aux réunions relatives à la politique HST, et la mise en place d’une formation minimale.
Norme 4 : Identification, diagnostic et soutien au sevrage tabagique
> L’identification des fumeurs, à qui l’on propose un accompagnement adapté.
Ce que révèle l’enquête ?
Si la délivrance de traitements pharmacologiques est assurée dans 84 % des établissements, la prise en charge des fumeurs et utilisateurs de vaporisateurs est peu proposée (30 %). En revanche, la moitié des établissements disposent d’une consultation de tabacologie/addictologie.
Ce qu’elle propose ?
Renforcer le repérage des patients fumeurs de façon plus précoce et délivrer un conseil minimal d’aide à l’arrêt, dès l’entrée dans le parcours de soin.
Norme 5 : Environnement sans tabac
> Le site dispose de stratégies pour mettre en œuvre un environnement sans tabac.
Ce que révèle l’enquête ?
96,7 % des répondants (soit 150 établissements) ont appliqué la mesure. Et 96 % déclarent interdire le commerce et la promotion des produits du tabac et vaporisateurs personnels.
Norme 6 : Lieu de travail sain
> Une stratégie de gestion des ressources humaines et de systèmes d’aide pour protéger et améliorer la santé de tous les collaborateurs.
Ce que révèle l’enquête ? 80 % des répondants disent être engagés dans la prévention au travail et la promotion de la santé. Mais 51 % des établissements n’ont pas identifié les personnels fumeurs et ne disposent pas d’un circuit de soin spécifique.
Norme 7 : Engagement dans la communauté
> L’engagement dans la lutte anti-tabac au niveau local.
Ce que révèle l’enquête ?
Cette politique doit être renforcée : seuls 26 % y participent.
Ce qu’elle propose ? Une politique de partenariats plus incitative avec la médecine de ville et les autres lieux de santé.
Norme 8 : Surveillance et évaluation
> Surveiller et évaluer régulièrement la mise en œuvre des normes HST.
Ce que révèle l’enquête ?
75 % des établissements répondants ne disposent pas de procédure de contrôle interne ou externe pour la surveiller et l’évaluer régulièrement.
Ce qu’elle propose ?
Intégrer dans les accréditations des établissements un volet « hôpital sans tabac » où sont renseignées les mesures mises en place.
« La lutte contre le tabac nécessite la mobilisation de tous, a exhorté Anne-Claire Amprou, directrice générale de la Santé. Il faut rompre avec ce climat de tolérance, d’autant que les lieux de santé ont un devoir d’exemplarité. » Avant de rappeler l’objectif du ministère de la Santé : 500 000 fumeurs de moins chaque année, tout au long du présent quinquennat.
Karen Ramsay
1. Enquête réalisée du 19 janvier au 30 avril 2017, sous la forme d’un questionnaire envoyé par mail aux directeurs d’établissement ou à leurs représentants.