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Après huit ans à la tête du conseil inter-régional Paca-Corse, le nouveau président du conseil national de l’Ordre des infirmiers présente une vision optimiste des chantiers qui concernent la profession, même si la vigilance s’impose face aux évolutions émanant des instances européennes.
Quels seront les enjeux prioritaires de votre action ?
Je veux d’abord miser sur des propositions de proximité. La collaboration inter-ordres, la reconnaissance des professionnels et des élus de terrain, le rapprochement avec les organisations syndicales, etc. En Paca, nous travaillons en Clio (Comité de liaison inter-ordres). Nous avons des projets communs, nous partageons beaucoup nos informations. Nous devons nous entendre pour être au plus près des besoins des patients. La proximité, c’est aussi essentiel en libéral. Or, il y a là tout un aspect de la pratique infirmière qui est insuffisamment mis en valeur. Les Idel ont un rôle social très important. Nous devons dresser un état des lieux de tout ce que font les infirmières auprès des patients, et partir de là pour élargir nos compétences et les faire reconnaître. Il faut aussi arrêter le pessimisme ambiant. Tous les chantiers sont devant nous. Des tas de choses existent ailleurs, comme certains gestes chirurgicaux, les pratiques en santé communautaire ou en santé publique, qui peuvent représenter un horizon formidable pour la profession. Nous devons accompagner les textes réglementaires qui permettront d’enregistrer ces évolutions de manière à ce que notre rôle soit mieux reconnu.
Vous évoquez le développement nécessaire de la présence de la profession dans les instances internationales, à quoi pensez-vous ?
Il y a d’abord notre implication au sein du Conseil international des infirmières. La France y est représentée par l’Association nationale française des infirmières et infirmiers diplômés et étudiants (Anfiide), mais l’Ordre doit également s’engager pour renforcer notre poids et davantage comparer nos pratiques à l’international. La barrière de la langue nous a longtemps handicapés, mais de plus en plus d’infirmiers sont compétents en anglais, donc il faut y aller. Nous devons également améliorer notre présence auprès des instances européennes pour mieux anticiper les réformes et peser sur les décisions. Si nous avions été plus présents au niveau européen, peut-être aurions-nous pu éviter l’accès partiel ? Bientôt, des évolutions concernant les règles qui régissent l’accès aux professions de santé dans les pays de l’UE seront annoncées. Or, ces procédures pourraient aboutir à diminuer les exigences. Nous devons rester très vigilants.
L’inquiétude de la profession que certaines de ses compétences soient dévolues à d’autres vous semble-t-elle justifiée ?
Notre profession a besoin de lisibilité. Si nos compétences se recoupent avec d’autres, ce n’est pas très bon pour l’usager non plus. Mais peut-être que dans notre évolution, nous devrons abandonner certaines choses… Il faut voir ce qui sera proposé par rapport aux aides-soignantes. Concernant la vaccination, les professionnels de santé sont des acteurs de santé publique et non des concurrents. Les pharmaciens ont immunisé 100 000 personnes contre la grippe l’année dernière sur deux territoires expérimentaux. Les IDE en ont, elles, officiellement vacciné 1,4 million, sans compter tous les gestes réalisés par des libéraux comme un 3e acte (c’est-à-dire non comptabilisé par la CNAM). Et énormément de salariés le font aussi. Donc, nous sommes largement au-dessus de ce chiffre. Nous avons la compétence et l’expérience. Quand pour se faire vacciner par un pharmacien, il faut se déplacer et que le professionnel dispose d’un espace de confidentialité… Si l’on ajoute à cela le fait que nous pourrions obtenir la possibilité de vacciner toutes pathologies confondues, il ne faut pas s’inquiéter outre-mesure.
Propos recueillis par Sandra Mignot