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Sept organisations syndicales ont tenu une conférence de presse ce 25 janvier pour appeler, d’une seule voix, les personnels des Ehpad et ceux des soins à domicile, à une journée de mobilisation nationale le 30 janvier. Une manifestation, « inédite » pour le secteur, qui témoignera de la « détresse » du personnel, mais aussi de « l’insuffisance des effectifs et des moyens » dans la prise en charge des personnes âgées.
« Aujourd’hui, les Ehpad ne sont pas des lieux de vie, car ils sont dans une logique perpétuelle de rendement. » La conférence de presse tenue conjointement par sept organisations syndicales et l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA), le 25 janvier à Paris, a peint un tableau très sombre de la situation au sein des Ehpad, tant pour le personnel – administratif, logistique et soignant – que pour les résidents. « Il s’agit d’une situation de crise, a confié Bruno Lamy, secrétaire général adjoint de la CFDT. Aujourd’hui, le taux d’accident du travail dans les Ehpad est deux fois supérieur à la moyenne nationale, et le taux d’absentéisme est en moyenne de 10%. »
Personnel en burn-out, taux d’absentéisme élevé, conditions de travail « dramatiques », étudiants peu encadrés, résidents en détresse… « Il faut des mesures urgentes, a exhorté Luc Delrue, secrétaire fédéral de FO santé/territoriaux. Les salariés ne peuvent accepter les propositions qui leur sont faites. On sait que la situation est compliquée. Mais le gouvernement doit ouvrir de vraies négociations. » Après la concertation de 350 délégués des Ehpad en novembre dernier, quatre revendications ont été définies et seront présentées au ministère des Solidarités et de la Santé :
- Application du ratio 1 :1 (un agent pour un résident), tel qu’il est prévu dans le Plan solidarité grand âge ;
- Abrogation des dispositions législatives relatives à la réforme de la tarification des Ehpad ;
- Arrêt des baisses de dotations induites par la convergence tarifaire et le maintien de tous les effectifs, y compris des contrats aidés « qui doivent être intégrés et sécurisés », précisent-ils ;
- Augmentation des rémunérations et amélioration des perspectives professionnelles.
« La question du grand âge n’est pas une petite question », a souligné le Dr Jean-Paul Zerbib du CFE-CGC. Plus d’un tiers des Ehpad fonctionnent sans médecin coordonnateur, ce qui est illégal. Les résidents sont de plus en plus maltraités, le temps des toilettes diminue, les aides-soignants sont débordés, les infirmières ne parviennent à assurer leur mission d’encadrement… Les effectifs ne sont pas suffisants, d’où la nécessité de rendre ces carrières plus attractives et de mieux rémunérer les personnels. » Ce que confirme Christian Cumin de CFTC Santé sociaux : « Il y a danger, et même non-assistance à personne en danger ». D’où la nécessité, selon lui, de se rapprocher des normes des autres pays européens et notamment du ratio 1 :1, alors que la moyenne en France est de 0.6.
Les pouvoirs publics ont été largement critiqués par l’ensemble des organisations syndicales, mais aussi par Pascal Champvert, président de l’AD-PA, qui a souligné leur « double discours permanent » où, derrière l’apparent souci de qualité se cachent des préoccupations essentiellement budgétaires : « À nous directeurs, on nous dit ‘Gardez vos histoires de qualité pour vos colloques. Ici, on est là pour parler de financement.’ » Ce qui explique, ajoute-t-il, la tarification pratiquée – et donc autorisée – par la plupart des territoires pour une heure d’aide à domicile (moins de 21 euros), alors qu’une étude réalisée par l’État indique 24 euros… « Nous demandons les excuses d’Agnès Buzyn qui, à trois reprises, a dit que s’il y avait des problèmes dans les établissements et les services à domicile, c’est que le management n’était pas à la hauteur. »
Le rassemblement du 30 janvier fera éclore dans tout le territoire des manifestations et rassemblements tant dans les rues qu’au sein même des Ehpad. Par exemple,
- Montpellier : ARS, 14 h 30
- Strasbourg : Place Kleber, 10 h
- Angers : Place Leclerc, 10 h 30
- Rodez : Place d’Armes, 15 h
- Amiens : Centre Saint-Victor, 10 h
- Grenoble : Préfecture, 15 h
- Lyon : ARS, 10 h 30
- Niort : Haut Place de la Brèche, 11 h
- Paris : ministère de la Santé, 14 h
Un appel à la mobilisation qui s’étend dans tout le pays… même si pour l’heure, les directives données à certaines régions – dont la Préfecture de Paris – sont claires : pas de ballons, pas d’affiches, pas de slogans, pas de musique…
Karen Ramsay