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Pour protester contre les économies réalisées « au détriment du patient », des médecins ont manifesté, le 26 mars, devant l’Agence régionale de santé, qu’ils accusent de dégrader le service public de santé à la faveur de cliniques privées.
« On n'est même plus au bord du gouffre, on est dedans », dénonce le Pr Jean-Philippe Mazzucotelli, chef de service en chirurgie cardiaque et porte-parole du collectif de médecins à l'origine de la manifestation qui a réuni, le 26 mars, plus de 150 soignants (médecins, infirmières, cadres, aides-soignants) des hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) devant les locaux de l’ARS Grand Est. En cause, le plan de retour à l'équilibre (PRE) qui impose, depuis deux ans, des économies importantes aux HUS. Les médecins estiment qu'ils ont fait toutes les coupes possibles. « Nous travaillons en permanence en mode dégradé, dénonce Jean-Philippe Mazzucotelli. Les moyens manquent partout. Ces économies se font au détriment de la qualité des soins, donc de la sécurité des patients, mais aussi de la santé des salariés, qui n'en peuvent plus. »
Le collectif de médecins réclame l'interruption du PRE et l'embauche d'une centaine de personnes. Il envisage de porter plainte, dès la semaine prochaine, contre l'ARS et la direction des HUS pour mise en danger de la vie d'autrui, maltraitance du personnel et favoritisme. « On nous impose toujours plus d'économies, et dans le même temps, l'ARS débloque des subventions pour des cliniques privées. C'est insupportable », s'indigne Jean-Philippe Mazzucotelli. Car explique-t-il, l'ARS a accordé 20 millions d'euros à la clinique Rhéna, qui a ouvert ses portes en février 2017 suite à la fusion des trois cliniques confessionnelles strasbourgeoises. Un groupement de cardiologues qui exerce dans les murs d'une autre clinique, l'Orangerie, propriété du groupe Elsan, a décidé de rejoindre ce nouvel équipement. L'Orangerie, s'estimant lésée, pourrait bénéficier, à son tour, d'une subvention de l'ARS pour développer sa propre activité en cardiologie interventionnelle.
Dans le même temps, au sein des HUS, la grogne monte. « Les infirmières sont rappelées sur leurs jours de congé en permanence, la situation est catastrophique, souligne Jean-Pierre Lusbec, secrétaire général de l'Union syndicale CGT 67 pour le secteur santé. Aujourd'hui, les salariés qui viennent nous voir sont de plus en plus souvent en situation de burn-out. »
Lisette Gries