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Écoute, aide et formation… L’Ordre national des infirmiers a décidé de renforcer son soutien aux professionnels en difficulté à travers un dispositif d’entraide. Une démarche validée par une enquête de l’Ordre qui révèle que pour 79,4 % des 18 865 IDE répondantes, la charge de travail est le principal facteur de mal-être.
« Un soignant ne peut soigner correctement que s’il est bien dans sa peau », avertit Patrick Chamboredon, président de l’Ordre national des infirmiers (ONI). Et à en croire les premiers résultats de l’enquête « Dépression, épuisement professionnel, mal-être : quelle réalité au sein de notre profession ? » (1) réalisée auprès de ses cotisants, le malaise est bien réel.
Pour 79,4 % des 18 653 répondants, la charge de travail ressort comme le facteur le plus important de mal-être, tous modes d’exercice confondus. Il est suivi par les violences et l’agressivité ambiante (57,46 %), les aspects financiers (50 %), talonnés par les choix éthiques et déontologiques (48,81 %). Environ 44 % des IDE ont aussi estimé que les conditions et le rythme de leur travail avaient des répercussions sur leur santé. « Et 21 % des répondants envisagent très souvent de quitter leur activité », ajoute Patrick Chamboredon.
Des résultats qui justifient largement l’opération « Solidarité ordinale infirmière » lancée ce 10 avril par le Conseil national de l’Ordre infirmier (CNOI). L’Ordre s’est ainsi associé à la plateforme Pass (0800 800 854), initialement créée par l’Ordre des médecins et désormais ouverte à l’ensemble des professionnels de santé. Celle-ci propose une écoute par des psychologues sept jours sur sept. Elle peut également organiser une intervention d’urgence en cas de situation aiguë. Fédérant sept associations locales (2), le dispositif est surtout encadré par une charte qui garantit notamment la confidentialité pour l’appelant et une garantie d’hospitalisation dans les 72 heures dans l’une des cinq unités spécialisées dans l’accueil des soignants, réparties sur le territoire. Enfin, elle pourra orienter les infirmières vers des services que l’Ordre a décidé de renforcer : aide financière, conseil juridique et accompagnement des professionnels victimes de violence pourront être proposés aux appelants de la plateforme.
« Nous travaillons également à l’élaboration d’un pack avec les experts comptables, afin d’aider les infirmières libérales dans la gestion de leur cabinet, explique Yann de Kerguenec, directeur du CNOI. Et nous allons également développer un accompagnement spécifique pour les soignants qui seraient suspendus pour pathologie. Cette mission de l’Ordre a été conçue pour protéger les patients bien sûr, mais il faut aussi penser à l’accompagnement du professionnel concerné. »
L’accès au DIU Soigner les soignants, jusqu’ici exclusivement réservé aux médecins, sera désormais également ouvert aux autres professions de santé, d’ici à la rentrée prochaine. Il ne s’agit pas seulement de former ceux qui interviennent dans les cinq unités spécialisées réparties sur le territoire, « mais il faut aussi que les représentants ordinaux et des soignants dans leur exercice quotidien puissent être des relais locaux capables de détecter les besoins chez leurs confrères/sœurs et de les orienter vers l’aide dont ils ont besoin », résume Patrick Chamboredon.
Sandra Mignot
1. Enquête réalisée au moyen d’un questionnaire auto-administré, du 30 mars au 7 avril 2018 auprès de 18 653 infirmiers (85,96 % de femmes et 14,04 % d’hommes), tous modes d’exercice confondus : 57,74 % de salariés, 39,18 % en exercice libéral et 3,07 % en exercice mixte.
2. AAPMS (Association d’aide professionnelle aux médecins et aux soignants), APSS (Association pour les soins aux soignants), Arene (Association régionale d’entraide du Nord-Est), Asra (Aide pour les soignants en Rhône-Alpes), ASSPC (Association santé des soignants de Poitou-Charentes), ERMB (Entraide régionale des médecins de Bretagne), Mots dans le Sud-Ouest (Médecin organisation travail santé).