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Une évaluation qualitative d’Asalée a été publiée par l’Irdes (Institut de recherche et de documentation en économie de la santé) en avril dernier. Pour Philippe Tisserand, président de la Fédération nationale des infirmiers (FNI), le document confirme le décalage entre coût et inconsistance du dispositif.
L’étude de l’Irdes révèle que les infirmières Asalée (Action de santé libérale en équipe) semblent satisfaites du dispositif. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
Elle est biaisée car elle est confiée à l’Irdes, dont le directeur de recherche – le Dr Yann Bourgueil – a encouragé le modèle Asalée dès sa conception. Cette évaluation manque d’indépendance. De plus, la méthode décrédibilise l’étude : seules 80 infirmières environ ont été interrogées (1). Enfin, l’Irdes fait un amalgame entre le dispositif et les infirmières de pratique avancée (IPA). Or, il existe un delta entre la formation des infirmières Asalée et le futur master des IPA. Tout cela n’est donc pas sérieux.
L’étude souligne un risque de “concurrence, lié à des recouvrements de compétences”. Quelle est la plus-value d’Asalée ?
Les auteurs relatent que l’infirmière « surveille les données des patients » ; « elle écoute […], propose des apprentissages », « réalise des actes techniques »… Mais les infirmières libérales font déjà cela : tout est prévu dans la nomenclature des actes infirmiers. On lit que les infirmières Asalée « [gèrent] la patientèle du médecin ». Mais c’est du secrétariat médical ! Par ailleurs, un ancien infirmier Asalée m’a raconté qu’il emmenait les patients âgés se promener, pour promouvoir l’activité physique. Ce qui est le rôle des auxiliaires de vie.
Qu’en concluez-vous pour la suite ?
En tant que membre du Haut Conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie, j’ai dénoncé, dès le début, ce dispositif. Les médecins surfent sur les problèmes des déserts médicaux et de la chronicité quasi pandémique des pathologies pour finalement obtenir un financement d’assistantes médicales sur fonds publics. Une étude d’impact (présentée par Dominique Polton en 2014, au Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie) a révélé qu’Asalée générerait un surcoût de 800 millions d’euros par an, pour les seuls diabétiques. Alors, eu égard au flou artistique révélé par l’Irdes, je pense que ce dispositif est voué à disparaître.
Propos recueillis par Émilie Lay
1. On comptait 310 infirmières Asalée en 2015, au moment où a débuté le travail de l’Irdes. Elles sont près de 600 aujourd’hui.
Asalée : un dispositif de prévention- Le dispositif Asalée a été créé en 2004 sous l’impulsion d’un médecin généraliste et d’un ingénieur spécialisé, avec le soutien de médecins de santé publique. Il est porté par une association du même nom, dont les infirmières sont salariées. |