12/11/2018

Flashmob postal : des infirmières écrivent au Président

Lancé le 8 octobre dernier par l’infirmière libérale et blogueuse Charline, le mouvement du « flashmob » postal consiste à envoyer en masse, le même jour et de manière répétée, des courriers de revendications infirmières au chef de l’État. Un nouveau moyen d’expression pour être enfin entendues ?

Amandine Chassang, 23 ans, est une participante assidue du « flashmob » postal : « À chaque fois, j’envoie huit courriers, confie la jeune femme qui assure des remplacements en libéral, tout en exerçant comme vacataire dans un établissement médico-social en Isère. Cela fait deux ans que j’ai obtenu mon diplôme. J’adore mon métier mais j’en arrive déjà à un point où je me demande si je vais pouvoir continuer très longtemps... » Nomenclature des actes professionnels obsolète, soins non payés, surcharge de travail, déshumanisation des soins… « J’ai l’impression que tous ces soignants qui se sont suicidés sur leur lieu de travail, sont morts pour rien, s’indigne Amandine. Personne n’en parle. Les conditions de travail des soignants doivent être prises au sérieux. Ce n’est pas un pansement sur une jambe de bois qu’il faut... »

   
Charline, Idel et blogueuse, est à l’origine de cet événement dont la prochaine édition se tiendra le 19 novembre.

Simple et gratuit

L’initiative de ce « flashmob » postal revient à Charline, 34 ans, infirmière libérale, auteure du blog « C’est l’infirmière – brèves et chroniques d’une infirmière rurale ». « C’est né d’un ras-le-bol général, explique-t-elle. Malgré les manifestations, nous ne sommes jamais entendues. Je me suis dit : ils ne veulent pas nous écouter ? Alors ils vont nous lire ! Écrire directement au Président est simple et gratuit. En jouant sur l’effet de masse et la répétition (*), peut-être parviendrons-nous à attirer l’attention du gouvernement ? », espère l’Idel.

Le premier « flashmob », réalisé le 8 octobre, était axé sur les revendications des libérales et comptait 1800 participants, estime Charline en se basant sur le nombre d’inscrits à l’événement Facebook. Quinze jours plus tard, le deuxième événement, associant les infirmières de structure, a attiré 3 700 personnes. Le dernier, qui a été élargi aux étudiants en soins infirmiers, en a mobilisé 2 700. « J’attribue ce fléchissement au pont du 1er novembre », tempère l’infirmière blogueuse. Pour le prochain « flashmob » du 19 novembre, Charline prépare un nouveau courrier pour que se joignent au mouvement les patients et le grand public.

« Rien à perdre »

« Si on ne se bat pas pour notre métier, qui le fera ? », s’interroge Jérémy Pinna (auteur du compte « Chroniques d’un ESI »). Cet étudiant en soins infirmiers en 3e année, âgé de 27 ans, a envoyé sa lettre lors du 3e flashmob. « Le manque d’effectif se répercute directement sur nos stages. Quel futur professionnel allons-nous être si le métier n’est pas revalorisé ? Dans ma région, on observe une baisse significative du nombre de candidats au concours. C’est un métier qui ne fait plus rêver... »

                   
              Jérémy Pinna (au centre), ESI de 3e année, souhaite se battre pour son futur métier.

Ce que confirme Charline : « Les infirmières quittent l’hôpital ou se reconvertissent en moyenne cinq ans après avoir obtenu leur diplôme. Je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de profession où les diplômés lâchent aussi rapidement, surtout après trois années d’études... » Elle qui n’est affiliée à aucun syndicat espère qu’une lettre du « flashmob » parvienne à dépasser le service de la correspondance présidentielle pour arriver jusqu’au bureau du Président. Et elle n’est pas prête de baisser les bras : « Je continuerai jusqu’à ce que l’Élysée nous réponde. Qu’est-ce qu’on a à perdre ? » Contacté, le ministère de la Santé n’a pas répondu à nos questions.

(*) Les « flashmobs » ont lieu un lundi tous les quinze jours. Les prochains : lundi 19 novembre et lundi 3 décembre.

La marche à suivre

Sur son blog (http://cestlinfirmiere.blogspot.com/p/flashmob-postal.html), Charline a écrit et mis à disposition plusieurs courriers types. Il suffit de les imprimer, les signer et les glisser dans une enveloppe à l’adresse du Président de la République (Palais de l’Eysée, 55 rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris). Pas besoin de timbre, l’affranchissement pour le Président est gratuit (jusque 20 g). Vous pouvez ajouter des affichettes avec des slogans chocs : « Stop aux soins gratuits », « La richesse de la santé ne se trouve pas dans la rentabilité », « Ne bradez pas nos compétences ».


Aurélie Vion

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