© Vincent Magrini
En décembre 2017, après une journée où elle était la seule infirmière pour les 99 résidents de son Ehpad, Mathilde Basset publiait sur Facebook une lettre ouverte à Agnès Buzyn. Elle y criait sa révolte face à la situation qu'elle vivait et y annonçait qu’elle quittait le métier. Un an plus tard, ce modeste post a été partagé des dizaines de milliers de fois, et il est devenu un livre*. L’IDE nous explique sa démarche.
Mathilde Basset : A la suite de ce message, j’ai été approchée par des médias, puis par des maisons d’édition. Je trouvais qu’écrire un livre était un bon moyen de poursuivre le combat, et d’informer les familles des résidents sur la situation dans les Ehpad.
M. B. : Il n’y a pas assez de postes de soignants. Il faut toujours faire vite, optimiser. On lève tous les résidents à 7 h, même si chez eux, ils avaient l’habitude de se lever à 9 h 30. Tout cela parce qu’il faut donner les petits-déjeuners, les médicaments… Le résident est obligé de se plier à l’organisation soignante, on a oublié que dans l'Ehpad, il est chez lui. C’est ce que je retrace dans le livre, en décrivant dans le détail non seulement la journée de décembre 2017 au cours de laquelle j’ai écrit cette fameuse lettre, mais aussi tout le parcours qui m’a menée jusque-là.
M. B. : Non. Plusieurs choses me dérangent. On parle d’une prime pour les soignants, mais on ne dit ni quand elle sera versée ni à combien elle s’élèvera. Il serait de toute façon préférable d’augmenter le salaire de tous les professionnels paramédicaux qui travaillent autour du vieillissement. On parle également d’adapter les loyers des maisons de retraite aux revenus des résidents. Mais est-ce qu’on ne risque pas de dégrader encore la qualité des prestations ?
M. B. : Je veux une augmentation de la masse salariale dans les Ehpad, des créations de postes d’infirmières et d’aides-soignantes. Quand on aura un nombre de soignants par résident acceptable, on pourra réorganiser le soin, l’axer véritablement autour du résident, de ses habitudes.
M. B. : C’est ce que j’ai vécu. Il est vrai qu’il peut aussi y avoir une question de coordination : nous avons parfois des lacunes au niveau de la communication entre soignants. Et il ne faut pas négliger la dynamique positive que peut parfois insuffler la direction d'un établissement. C'était le cas dans un Ehpad où j'ai travaillé en première année. Les choses fonctionnaient bien, et j'ai l'impression que la direction n'y était pas étrangère. Mais il faut aussi dire que cet établissement disposait des moyens nécessaires : nous étions environ un soignant pour deux résidents.
Propos recueillis par Adrien Renaud
* « J'ai rendu mon uniforme », Editions du Rocher, janvier 2019.
POUR ALLER PLUS LOIN...
Enjeux éthiques du vieillissement : l'interview de Régis Aubry, membre du Comité consultatif national d'éthique (CCNE), paru dans Objectif Soins et Management (réservé aux abonnés)