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Plusieurs intervenants du congrès annuel de la SF2H, qui s'est tenu début juin à Strasbourg, ont remarqué que les cas de grippe nosocomiale, qui touche essentiellement des sujets fragiles, peuvent être limités dès lors que 35 à 40 % des soignants sont vaccinés.
Lors de son intervention au congrès de la Société française d'hygiène hospitalière (SF2H), le Pr Bruno Lina, professeur de virologie à Lyon (Croix-Rousse) et responsable du centre national de référence contre la grippe, a souligné l'insuffisante couverture vaccinale des professionnels de santé contre la grippe. Sa remarque, qui portait d'abord sur son établissement, fait écho aux constats dressés par d'autres intervenants lors du congrès. Ainsi, au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) de Genève, le taux de vaccination était en 2011 de 29,5%, selon Philippe Bressin, cadre hygiéniste. Dans les onze Ehpad étudiés par Pr France Borgey (CHU de Caen) en Normandie, la couverture vaccinale en 2013 ne dépassait pas les 27,6%.
« Or, il faut que 35 % des professionnels soient vaccinés pour diminuer efficacement le taux de grippes nosocomiales », a annoncé Bruno Lina. L'essentiel des contacts humains dans les services a lieu parmi les soignants et entre ces derniers et les patients. « Une même infirmière peut avoir des contacts avec toutes ses collègues et avec tous les patients au cours d'une même journée », a fait remarquer le professeur.
En transmettant la grippe a des personnes fragilisées, cette infirmière infectée peut être « responsable » d'un certain nombre de complications. « La grippe est la troisième cause d'entrée en dépendance, avant la fracture de hanche », a expliqué Bruno Lina. « La grippe peut être responsable d'infarctus du myocarde, de décompensations cardiaque ou encore d'AVC, a ajouté Jacques Gaillat, spécialiste en médecine interne au CH d'Annecy-Genevois. Il y a aussi une corrélation entre les épidémies de grippe et le taux de fractures du col du fémur. » « On observe qu'une grippe sur deux ayant nécessité l'hospitalisation du patient est d'origine nosocomiale », a complété Bruno Lina.
Si le vaccin n'est pas efficace à 100 % mais « plutôt autour de 50 à 60 %», selon Bruno Lina, il reste la meilleure protection contre la propagation du virus. Il faut donc convaincre les soignants de se soumettre à l'injection annuelle. « Parmi les freins évoqués, il y a le manque de confiance dans le vaccin et dans les laboratoires », a détaillé Catherine Métais, infirmière hygéniste au CH du Sud Seine-et-Marne. Autre point noir : le manque de temps pour se faire vacciner.
Plusieurs établissements ont choisi de mettre en place des campagnes, à la fois pour informer les soignants et pour faciliter leur vaccination. Au CHUV, par exemple, des stands ont été installés près des vestiaires le matin, à l'heure du changement d'équipe, et en face du réfectoire pendant la pause méridienne. Ailleurs, des équipes mobiles se sont déplacées dans les services.
Ces efforts sont payants : non seulement le nombre de cas de grippe diminue, mais les infections nosocomiales sont moins nombreuses parmi les cas recensés. « A l'hôpital Croix-Rousse de Lyon, on observe que 97 % des cas de grippe en gériatrie étaient d'origine nosocomiale quand il n'y avait pas de politique de vaccination, contre 39 % lorsque cette politique a été mise en œuvre », a conclu Bruno Lina.
Lisette Gries