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Orientations prioritaires trop nombreuses, contrôles lacunaires des formations, forfaits surévalués… La Cour des comptes relève de « profonds dysfonctionnements dans le pilotage et le fonctionnement du DPC, ne permettant pas d’atteindre les buts » assignés à l’agence, dans un référé à l'adresse de la ministre de la Santé, en ligne le 1er juillet.
La Cour des Comptes commence par s’attaquer aux orientations prioritaires beaucoup trop nombreuses et souvent imprécises qui mettent l’agence dans « l'impossibilité d'évaluer la plus-value du DPC et de son apport à la qualié et à la sécurité des soins ». Pour contourner cette difficulté, il faudrait « une approche beaucoup plus sélective » en fonctionnant par appel d’offre, recommandent les magistrats.
Autre carence de l’ANDPC, les contrôles « particulièrement lacunaires » ne permettent pas de « s’assurer de la réalité ni du contenu des actions de DPC ». Ainsi, les CSI (commission scientifique indépendante) contrôlent au niveau pédagogique moins de 10 % des actions proposées et rendent un avis défavorable dans 44 % des cas.
La Cours des comptes n’est pas plus tendre sur les financements jugés généreux et « sans contrôles ». Les forfaits sont « surévalués ». L’Agence dispose d’un budget de 190 millions d’euros qui seront portés à 204 millions financés par l’Assurance maladie en 2022. La Cour des comptes évalue le surcoût à 100 millions d’euros sur les 5 dernières années. Elle pointe aussi le financement d’actions de DPC se déroulant à l’étranger, y compris hors de l’UE, et l’insuffisance de contrôle des formations e-learning qui représentent le quart des actions de DPC suivies.
Parmi ses recommandations, la Cour demande de limiter à trois le nombre d’actions prises en charge par professionnel de santé et par cycle de DPC et d’instaurer un contrôle croisé des financements des différents financeurs. Elle demande de définir les orientations prioritaires 2019-2021 en s’appuyant sur les CNP (conseils nationaux professionnels) et la HAS et de privilégier le recours aux appels d’offre pour les organiser. Enfin, elle demande de donner des moyens à l'ANDPC de contrôler sur place les actions de DPC.
La publication de ce référé est intervenue deux jours après la publication d’un arrêté reconduisant Michèle Lenoir-Salfati pour 3 ans à la tête de l’ANDPC.
Dans un courrier, la ministre de la Santé a répondu point par point à la Cour des comptes en indiquant notamment que les orientations du DPC pour la période 2020-2022 publiées au cours du mois de juillet seront « plus resserrées ». Elles contiendront en outre des fiches de cadrage opposables précisant les enjeux, le périmètre et les attendus en termes de programmes. Concernant l’indépendance des organismes de DPC par rapport à l’industrie, Agnès Buzyn précise que l’interdiction de l’enregistrement des organismes financés par l’industrie a été écarté « en raisons de risques contentieux ». La gestion des conflits d’intérêt a donc été confiée à un comité d’éthique.
Pour renforcer l’indépendance des organismes de DPC, un amendement au projet de loi de santé actuellement au Parlement, impose aux entreprises de rendre publiques divers informations dont le montant des conventions qu’elles concluent avec ces organismes. Par ailleurs, pour renforcer le contrôle des actions de formation, des mesures seront prises par voie réglementaire. Enfin, des ajustements seront faits sur les montants des forfaits. Quant à la limitation du nombre d’actions de DPC prises en charge par professionnel, les sections professionnelles auxquelles la gestion de l’enveloppe annuelle est confiée peuvent prendre cette décision pour une période donnée.
Anne-Chantal de Divonne