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La profession infirmière est plus que jamais confrontée à des situations de violence de la part des patients et de leur entourage. Quelles solutions pour y faire face ? Le point avec Patrick Chamboredon, président de l’Ordre national des infirmiers (Oni).
Patrick Chamboredon : Concernant cet infirmier, je l’ai eu au téléphone. Il a reçu le soutien de l’Ordre. Il va avoir un long arrêt de travail… Une plaie par balle, ce n’est pas anodin. Il va se rétablir dans un établissement de plaie et cicatrisation à côté de chez lui. Cet infirmier travaillait seul, en territoire rural, et son premier réflexe a été de penser à ses patients. C’est tout à son honneur. Par solidarité, les infirmiers de son secteur ont pris le relai. L’Oni est présent pour soutenir les soignants victimes. Malheureusement, nous pouvons difficilement intervenir autrement qu’en soutien.
La société se durcit et nous déplorons l’augmentation du nombre de violences à l’encontre des soignants. C’est difficile de prévenir et de répondre à cette violence car elle sévit dans la société en général, elle est exacerbée. Mais peut-être les chiffres augmentent-ils parce que les langues se délient davantage. Auparavant, les soignants trouvaient des circonstances atténuantes à la violence dont ils pouvaient être victimes. Aujourd’hui, ils portent plainte. Il y a une prise de conscience plus globale. Mais face à cette dérive de la société, il est difficile d’agir en amont.
Equiper les soignants d’un boîtier d’alerte me paraît être une bonne idée mais la police arrivera-t-elle dans les temps ? Et quel serait le modèle économique d’une telle mesure ? L’exercice en libéral rend vulnérable et les soignants sont difficiles à localiser. Pour les Idel victimes de violence, il est possible de les intégrer dans le réseau d’entraide de l’Oni. Il permet d’organiser, si besoin, le relai de l’infirmier pour sa tournée et de lui apporter un soutien par ses pairs. Cette assistance existe via des référents violence au sein de chaque conseil départemental ou interdépartemental et l’Ordre propose également une entraide téléphonique.
De plus, nous nous proposons de nous constituer partie civile lorsqu’il y a un procès afin d’apporter un soutien visible à l’infirmier victime. Néanmoins, notre rôle s’arrête là. Nous n’avons pas de pouvoir de coercition et d’enquête. Il faut que la police s’inquiète des difficultés des soignants exprimées dans l’exercice de leur profession. D’ailleurs, une convention a été signée entre l’Ordre, la police et la chancellerie pour faciliter le dépôt de plainte de la part des soignants. D’autant que dans certains quartiers, des infirmiers craignent des représailles. Il paraît nécessaire aussi de se former pour désamorcer les situations de violence. Les infirmiers libéraux sont en première ligne et se désamorçage demande un savoir-faire. Il faut savoir sentir le danger.
Pour les salariés, il existe un réseau en interne, au sein de chaque hôpital. Généralement, un rappel des règles de bienséance est affiché dans les salles d’attente. Il est précisé que tout débordement fera l’objet de plaintes et il arrive que des vigiles soient présents pour calmer les gens.
Propos recueillis par Laure Martin