harcelement et violence

03/10/2019

Violences faites aux femmes : savoir détecter

Parce qu'elles entrent dans les foyers, les Idels sont bien placées pour détecter des situations de violence faites à leurs patientes. Mais prendre en charge ces femmes de manière appropriée nécessite de reconnaître les signes.

En France, depuis le début de l’année et à l’heure où nous bouclons cet article, 106 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint, selon le collectif #NousToutes, soit une tous les deux jours et demi. Mais les violences conjugales touchent hélas bien plus de femmes. 219 000 femmes adultes sont victimes chaque année de violences physiques et/ou sexuelles commises par un conjoint ou un ex-conjoint. Parmi elles, plus de 44 000 sont victimes de viol.

Longtemps taboue pour les soignants, la violence domestique s’impose désormais comme un problème de santé publique. Les répercussions sont sérieuses et dépassent largement les traumatismes physiques qui résultent directement des accès de violence (hématomes, fractures, brûlures, etc.). « Les psychotraumatismes subis sont profonds, et les victimes sont plus exposées aux maladies psychosomatiques (insomnies, stress, lombalgies, maux de ventre, douleurs articulaires), mais aussi aux pathologies chroniques comme le diabète ou certains cancers. Enfin, il y a un risque accru de développer des addictions », détaille Azucena Chavez, psychologue au sein de l’Institut de victimologie. « On estime aujourd’hui que les femmes victimes de violence perdent de une à quatre années d’espérance de vie en bonne santé », souligne Frédérique Martz, cofondatrice de l’association Women Safe, qui propose un accompagnement pluridisciplinaire des femmes victimes.

Distinguer conflit et violence

Pourtant, trop peu de ces femmes sont prises en charge, notamment parce qu’elles ne disent à personne qu’elles subissent des violences. « La violence psychologique est toujours présente, dès le début et souvent plusieurs années avant le premier coup, explique Ernestine Ronai, responsable de l’Observatoire départemental des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis. L’agresseur dévalorise et humilie sa victime, il ancre en elle l’idée qu’elle n’est bonne à rien. » Et aussi qu’elle ne sera pas crue si elle se confie.

De l’avis de tous les intervenants du secteur, les Idels ont là un rôle important à jouer. « Elles vont au domicile des patients, voient et ressentent des choses du quotidien des couples que les soignants à l’hôpital ou en cabinet ne remarquent pas forcément. Elles sont des sentinelles », résume Isabelle Chaume, chargée de mission au sein de l’association SOS Femmes 13.

« On sent effectivement des ambiances, confirme Charline, Idel et rédactrice du blog “C’est l’infirmière”. Mais que l’on ait des soupçons ou que l’on ait été témoin de violences, il est très dur de savoir comment réagir. On est devant un dilemme : difficile de ne rien faire, mais d’un autre côté, que dire ou faire pour ne pas aggraver la situation ? » De fait, même si l’inscription de modules de sensibilisation aux violences faites aux femmes dans les cursus de formation a été rendue obligatoire par la loi de 2014 sur l’égalité réelle entre les femmes et les hommes (art. 51), ces modules ne sont pas encore généralisés dans les Ifsi.

Lisette Gries



Violences faites aux femmes : L'Idel a un rôle à jouer

À lire dans « L'Infirmière libérale magazine », n° 362

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