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Parmi les 1200 médecins qui menacent de démissionner de leurs fonctions administratives si le gouvernement n’investit pas plus dans l’hôpital public, six ont été reçus par Agnès Buzyn vendredi dernier. Le Dr Antoinette Perlat, responsable d’une unité fonctionnelle au CHU de Rennes, était du nombre.
Antoinette Perlat : Nous manquons de personnel. Le personnel paramédical, notamment, est épuisé et se sent maltraité. Quand quelqu’un est absent, par exemple, il n’est pas remplacé. On est donc toujours à flux tendu, et on est obligé de faire des choix : on ne lève plus les malades pour qu’ils aillent au fauteuil, on demande aux familles de nous aider pour les repas… La seule façon d’agir, c’est d’obtenir plus de moyens, très rapidement.
Le Collectif Inter-hôpitaux, dont je fais partie, a rejoint le mouvement de grève aux urgences à l’automne, pour les soutenir et pour voir si on pouvait avoir une action plus globale. Nous avons entendu les propositions qui ont été faites en novembre, avec notamment la reprise d’une partie de la dette des hôpitaux, et cela ne nous semble pas suffisant. Nous avons été reçus en décembre, et on nous a réexpliqué les mesures de décembre. Il fallait donc un geste fort : arrêter de discuter et de collaborer avec l’administration. D’où l’idée de démissionner de nos fonctions administratives. Nous n’avons plus les moyens de diriger nos équipes, et nous refusons de le faire.
Nous avons d’abord demandé une augmentation du salaire des paramédicaux, mais elle nous a répondu que ce n’était pas une réponse aux problèmes de l’hôpital. Nous lui avons aussi demandé une augmentation de l’Ondam (Objectif national de dépenses d’Assurance maladie, NDLR) de 800 millions d’euros pour cette année, et elle nous a aussi opposé une fin de non-recevoir. Nous lui avons par ailleurs demandé pourquoi seulement une partie de la dette était reprise. Nous considérons que cette mesure est surtout financière, mais on pourrait selon nous reprendre toute la dette. Il nous a été répondu qu’il y avait des bonnes dettes ! Nous avons aussi rappelé qu’Emmanuel Macron voulait amener la T2A (Tarification à l’activité, NDLR), qui est une source de grande souffrance dans les établissements, à moins de 50 % du financement des hôpitaux. Manifestement, la ministre cherche encore un moyen d’y arriver. La seule ouverture qu’elle a consentie était sur la modification de la gouvernance hospitalière.
Nous avons été très déçus par le rendez-vous avec la ministre. Nous demandions un geste fort, et nous voyons que rien n’a été débloqué pour les soins. Nous sommes donc en train de finaliser le calendrier de la démission. Celle-ci devrait être effective avant la fin du mois de janvier. Nous continuons d’ailleurs à appeler nos collègues à la démission. Nous réfléchissons enfin à d’autres moyens d’action… et nous allons manifester le 14 février.
Propos recueillis par Adrien Renaud