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Les infirmières libérales étaient dans la rue le 3 février pour dénoncer la réforme des retraites. Et leur combat continue… Avec seize autres professions libérales, portées par le collectif SOS retraites, elles dénoncent les mesures gouvernementales et entendent soulever l’opinion.
« Nous refusons la réforme des retraites en l’état, nous refusons de laisser tomber notre caisse autonome, de laisser partir nos réserves pour combler le déficit de l’État alors qu’elles ont été faites par nous et pour nous », dénonce Marieke Motto, présidente de l’Union nationale des infirmiers diplômés d’État libéraux (Unidel), membre du collectif SOS retraites qui regroupe d’autres professions libérales comme des avocats, des experts-comptables, des kinésithérapeutes et des médecins. La réforme des retraites prévoit notamment de mettre un terme aux caisses autonomes de retraite afin de tendre vers un système global.
« Nous avons été exclus de ce modèle en 1945 et sommes parvenus à nous gérer, à nous auto-gérer, poursuit Marieke Motto. Pourquoi mettre fin à un système qui fonctionne ? D’autant que nous participons également à la vie collective à hauteur de 7 % de nos cotisations qui vont à l’État, soit plusieurs millions d’euros par an. »
« En nous gérant nous-mêmes, nous sommes entre pairs, et nous parvenons à bien équilibrer nos caisses, excédentaires, renchérit Ghislaine Sicre, présidente de Convergence infirmière, syndicat représentatif des infirmières libérales et membre du collectif SOS retraites. Maintenant, nous allons devoir donner nos réserves à l’État, et lui ne sait pas gérer les retraites, on le voit avec le déficit… Pourquoi changer un système qui était vertueux jusqu’à présent ? C’est un hold-up en col blanc, le casse du siècle. »
Les Idel dénoncent également le doublement de leur cotisation de 14 à 28 %. « Les syndicats représentatifs de la profession travaillent sur la baisse de la CSG en compensation mais cette solution n’est pas sécuritaire car rien ne nous garantit qu’un prochain gouvernement ne prenne pas une ordonnance et révise les dispositions actées », explique Marieke Motto.
« Cette compensation avec la CSG n’est pas inscrite dans le texte de loi », poursuit Ghislaine Sicre. Les Idel étant conventionnées avec l’Assurance maladie, elles ne peuvent pas augmenter le prix des actes. « Nous allons donc devoir travailler plus pour maintenir nos niveaux de revenus, regrette Marieke Motto. Ce n’est pas possible. D’après nous, l’apparition de déserts paramédicaux est à envisager car les cabinets ne vont pas pouvoir suivre et les Idel risquent de fermer leur cabinet pour retourner à l’hôpital. »
Deux autres syndicats représentatifs de la profession, à savoir la Fédération nationale des infirmiers (FNI) et le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil), n’appellent pas à la mobilisation. « Nous sommes toujours dans l’optique de privilégier la négociation pour faire bouger les lignes », explique Catherine Kirnidis, présidente du Sniil. Ces négociations avec le ministère se font par l’intermédiaire de la Fédération française des praticiens de santé (FFPS), présidée par Daniel Guillerm, également président de la FNI. La FFPS a rencontré la ministre de la Santé le 22 janvier afin de demander des engagements pour un « réajustement des mesures au fil de l’eau débouchant sur des avancées favorables aux praticiens de santé ».
La FFPS a effectivement demandé la compensation de l’augmentation prévue des cotisations, une augmentation du financement de l’avantage social vieillesse (ASV) par l’Assurance maladie dans le cadre de la réforme en cours et la prise en compte, dans les mécanismes de compensation, des spécificités des départements et territoires ultra-marins.
D’après la FFPS, la ministre de la Santé s’est engagée à se rapprocher de Nicolas Revel, directeur général de la Cnam, afin de trouver un alignement possible avec l’Assurance maladie pour l’ouverture de négociations transversales sur l’ASV des praticiens de santé. Les négociations étant terminées, « nous allons nous assurer que les promesses qu’on nous a faites vont être inscrites dans la loi », assure Catherine Kirnidis.
De son côté, le collectif SOS retraites entend bien poursuivre ses actions. « Nous avons décidé d’organiser, à partir de début mars, des réunions dans les grandes villes de France, afin d’alerter les soignants et les autres professions sur les enjeux de cette réforme en vue des prochaines élections présidentielles, fait savoir Ghislaine Sicre. Les Idel prennent en charge quotidiennement un million de personnes, l’impact peut être majeur sur autant d’électeurs. »
Le collectif entend également influencer les députés autres que ceux de la majorité afin qu’ils « détricotent » la réforme.
Laure Martin
Les infirmières encore dans le flouA lire dans « L'Infirmière magazine », n° 412Réservé aux abonnés |