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Le président de la République a annoncé dimanche que les visites des familles aux résidents des Ehpad étaient de nouveau autorisées dès aujourd’hui 15 juin. Une décision attendue avec impatience par beaucoup d’infirmières.
Un grand soupir de soulagement. Voilà la réaction qu’ont eu de nombreuses infirmières travaillant en Ehpad en entendant Emmanuel Macron décréter le 14 juin que les résidents dont elles s’occupent pourraient dès le lendemain de nouveau recevoir la visite de leurs proches dans des conditions normales. Car, depuis le mois de mars et l’interdiction totale des visites, qui n’avait été que partiellement assouplie courant avril, le maintien du lien entre les résidents et leur famille était devenu de plus en plus problématique au sein des établissements.
« L’absence de visite a été très difficile pour beaucoup de résidents qui ont perdu leurs repères du jour au lendemain, nous avons constaté chez certains d’entre eux une majoration des troubles cognitifs », témoigne Pauline Calloch, infirmière dans un Ehpad de Carantec, dans le Finistère. Même son de cloche dans le Gers, à l’Ehpad La Pépinière de Fleurance. « Nous avions pu mettre en place des solutions pour garder un lien virtuel, par exemple avec WhatsApp, mais c’était largement insuffisant pour plusieurs résidents », explique Pascale Maury, qui y est Infirmière coordinatrice (Idec).
Dans ce contexte, la reprise des visites mi-avril, avec de nombreuses restrictions, a été un bol d’air bienvenu… mais pas vraiment la délivrance que résidents, familles et soignants attendaient. « Nous avons organisé des visites en "parloir", explique Pauline Calloch. Les familles entraient dans un bureau avec accès extérieur et ressortaient par la même porte, elles devaient être masquées, et nous avons mis deux tables pour couper la pièce en deux, de sorte qu’une distance minimale de 2 à 2,5 mètres soit respectée… » Des conditions qui étaient préférables à la situation antérieure, mais qui étaient loin d’être idéales, reconnaît l’infirmière.
Et encore, certains établissements ont dû mettre en place des mesures encore plus restrictives. Sans aller jusqu’à élever entre les résidents et leurs familles des barrières en plexiglas, voire des grilles, comme ont dû le faire certains Ehpad, l’Ehpad de Pascale Maury a été contraint de mettre en place une surveillance des visites par un membre du personnel, afin d’éviter que les résidents et leurs familles ne se touchent. Ce travail de surveillance a d’ailleurs dû être attribué à du personnel non soignant ou à des bénévoles. « Les résidents n’auraient pas pu comprendre comment des personnes qui les touchent toute la journée pour faire les soins pouvaient leur interdire de toucher leur famille », commente l’Idec.
Heureusement, les familles ont parfois pu trouver des voies détournées pour voir les leurs tout en respectant la distanciation sociale. « Nous avons des balcons, donc il arrivait que des enfants viennent se mettre sous les fenêtres, et les résidents pouvaient ainsi discuter avec leurs proches, même depuis le deuxième ou le troisième étage », raconte Pauline Calloch. Reste que ces succédanés de moments partagés ne remplacent pas les véritables visites. Le retour à la normale apportera donc un soulagement dans les Ehpad… mais un soulagement qui ne sera pas dénué d’appréhension. « Quand je vois le peu de respect des gestes barrière à l’extérieur, je n’ai pas la moindre idée de la manière dont le lavage des mains et le port du masque seront maintenus avec la reprise des visites en chambre, quand l’émotion et les sentiments prendront le dessus », s’interroge Pascale Maury.
Adrien Renaud