30/06/2020

ARS  : comment mieux faire le lien avec le terrain  ?

Le fonctionnement des ARS a montré des faiblesses pendant la Covid-19. Structures administratives, ces institutions auraient-elles perdu le lien avec le terrain ? C’est l’avis de certains qui prônent un retour des élus dans leur gestion.

Des voix se sont élevées pendant et après le confinement pour regretter que les ARS n’aient pas assuré au mieux la gestion de la crise sanitaire. «  Il y a notamment eu la mauvaise gestion des lits en clinique privée, libérés pour recevoir des patients Covid et qui ont été très peu utilisés alors que les hôpitaux publics étaient en souffrance  », indique Thierry Amouroux, infirmier et porte-parole du SNPI  (1).

De leur côté, les infirmières libérales, dont les liens avec les ARS ont été moins directs, regrettent également les difficultés de commu­nication avec les agences mais aussi celles de la Caisse nationale d’Assurance maladie (Cnam). «  Cer­taines informations descendantes n’étaient pas cohérentes. On a eu du mal à recevoir les bonnes infos au bon moment de l’Assurance maladie ou du ministère  », indique Catherine Kirnidis, présidente du Sniil  (2). La rémunération de nouveaux actes pendant la crise ou l’approvisionnement en protections ont causé des tensions dans les pratiques paramédicales en ville.

«  Malfaçons originelles  »

Après ces constats du terrain, le Sénat a mené des consultations à la fin du mois de mai pour identifier les dysfonctionnements des ARS. «  Quand il fallait agir vite, on a entendu le doux bruissement des parapluies [des ARS, NDLR] qui s’ouvraient. Nous avons dû nous y substituer pour fournir les masques aux pharmaciens, aux libéraux, déplore Jean-Louis Thiériot  (3), dé­puté LR de Seine-et-Marne. J’ai constaté que l’état sanitaire et l’ARS étaient peu adaptés à la gestion de l’urgence et [dans l’]incapacité de suivre les flux logistiques.  »

Frédéric Pierru, sociologue et spécialiste du système de santé qui étudie le fonctionnement des ARS depuis leur création, remarque quant à lui que la crise sanitaire n’aura fait que «  révéler les malfaçons originelles des ARS. Il ne faut pas en faire les boucs émissaires et les rendre responsables de choses pour lesquelles elles n’ont pas été faites.  » (3) La loi HPST (hôpital, patients, santé, territoires) serait le nœud à démêler en priorité. «  L’évolution du système de santé, c’est la centralisation croissante. La loi HPST a été faite pour contourner les élus locaux vus comme des freins à la gestion hospitalière, pour éloigner le régulateur régional de la pression des élus locaux  », indique-t-il en précisant que le rôle des départements dans la gestion des soins a été fortement amoindri.

Piste de solutions

Les responsabilités sanitaires de­vraient-elles être davantage politi­ques et ancrées dans les territoires  ? Comment rendre le système plus fonctionnel pour les soignants hospitaliers et en ville, comment garantir une gestion harmonisée dans les territoires ? «  Les directeurs des ARS font aujourd’hui trois ans dans une région, trois ans dans une autre… ils sont hors-sol  », indique Thierry Amouroux. Avis partagé par Jean-Louis Thiériot  : « Sans responsabilité politique, on arrive à une vision très technocratique des choses alors que les élus des collectivités lo­cales comprennent vraiment les be­soins d’un territoire.  »

Pour Frédéric Bierry, président du conseil départemental du Bas-Rhin  (3), lourdement touché par la crise, «  il faut résoudre cette incapacité [des ARS] à franchir le dernier kilomètre : les acteurs locaux ont suppléé à leurs carences, notamment pour les masques  », énonce-t-il en pointant du doigt le besoin d’une vision globale du système de soins. «  Il faut donner un rôle de chef de file aux départements pour coordonner le sanitaire et le médico-social, en lien avec le bloc local et les services de l’État.  » 

Modèle britannique

Une vision transverse de la santé partagée par le Sniil : «  Les ARS doivent perdurer sans reproduire une centralisation unique en région mais en s’ouvrant aux autres professionnels de terrain libéraux  » , conclut Catherine Kirnidis. Le sociologue Frédéric Pierru propose de suivre le modèle britannique « plus révolutionnaire ». Là- bas, « un Primary Caretrust, une structure territoriale, gère l’ensem­ble de l’offre de soins pour environ 60 000 habitants : la médecine de ville, l’hôpital, le volet médico-social et la prévention avec une représentation des élus locaux .» Une vision imbriquée de la santé à l’échelle locale. 

Sandrine Lana

1- Syndicat national des professionnels infirmiers.
2- Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux.
3- Propos tenus lors de la table ronde organisée par le Sénat le 28 mai  : «  La coordination entre les collectivités territoriales et les agences régionales de santé (ARS)  : premier bilan  ».

Les dernières réactions

  • 30/06/2020 à 14:18
    De Valery
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    Les ARS ont montré leur manque d'efficience lors du COVID-19.

    Soit ce modèle est capable d'évoluer, soit il mérite de disparaître. Encore une fois, il est important de préciser que beaucoup de fonctionnaires de l'ARS sont des Énarques (mal classés pour beaucoup, je sais c'est politiquement incorrect de le dire mais c'est une vérité !!!) qui sont des gestionnaires et ont une vision comptable de la santé, voir le carnage de la T2A et ses impacts sur les soignants (c'est une vérité même s'il existe certes des médecins rattachés aux ARS etc).

    Il est totalement anormal qu'un fonctionnaire de l'ARS donne des ordres à des médecins, des Professeurs de médecine sur comment il faut gérer un service, qu'il faut supprimer tant de lits et j'en passe.

    Etant membre d'une association aidant des patients, je peux vous certifier que certains fonctionnaires de l'ARS sont en décalage complet avec les difficultés rencontrées par les soignants, les aidants et patients. (je les ai rencontré lors de colloques consacrés sur la santé, allez-y chers soignants, ça vaut le détour)

    Les ARS coûtent un pognon de dingue au même titre que certaines autres AAI. Il n'y en a trop (HAS, HSCP, ARS et j'en oublie) alors que sur le terrain, l'AS/l'IDE doit gérer X patients, générant un grave mal-être. Tout cet argent de la Sécurité Sociale, un trésor, doit être utilisé pour les soignants en priorité.

    Une AS gagne un SMIC pour exercer un métier à responsabilités (civile et pénale même en étant sous la responsabilité d'une IDE)
    avec des conditions de travail indigne du XXIe siècle (voir le dossier de certains EHPAD cotés en Bourse)

    Une IDE, pas mieux qu'une AS avec des responsabilités accrues.

    30% des IDE quittent la profession au bout de 5 ans selon le SNPI (chiffre repris par le Professeur GRIMALDI). Allô l'ARS, il y a quelqu'un ? Depuis 5 ans, -40% de candidats pour intégrer un IFAS selon la DREES ? Allô ? il y a quelqu'un au bout du fil ?
  • 02/07/2020 à 18:31
    Natsoleil
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    Bravo! Enfin des propos clairs!!!
    Un exemple: ce zonage pour les installations des infirmières libérales, publié au JO en janvier dernier. On attend le bon vouloir des ARS pour que ce zonage soit validé. ARS et CPAM se renvoient la balle et ma remplaçante, alors que le nouveau zonage devrait autoriser un conventionnement
    indispensable pour mon cabinet, s'est vu refuser cette autorisation de mettre sa plaque, en pleine crise Covid, alors que l'on appelle des infirmières réservistes! C'est une réponse inadaptée en situation de crise et les responsabilités seront mises en cause. Les Idels sont au front et la bureaucratie leur met des bâtons dans les roues au lieu de les soutenir. Je suis indignée.
  • 02/07/2020 à 18:40
    nenette
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    je suis d'accord avec ce Monsieur De Valery ça sert à quoi une ARS nous les infirmières libérales ont paye une cotisation pour l'ARS pour
    les syndicats si on veut être syndiquer et pour l'ONI on n'avait pas assez de charges avec l'urssaf et la carpimko
    l'ARS ne m'a rapporté aucun malade n'a pas empêché les ssiad les HAD de s'installer donc concurrence illégale
  • 03/07/2020 à 10:52
    Criducoeur
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    Nénette je pense que vous devriez vous renseigner sur ce que sont les ARS. Ils sont en rien là pour nous ramener des patients mais pour représenter l'état dans chaque région et département... etre au plus près des territoires..
    En revanche les propros du sociologue me font peur! Encore mettre de la hiérarchie aux libéraux. Le modèle anglais n'est je pense pas du tout adapté à la france! Si vous voulez braquer les liberaux il n'y a rien de mieux !
  • 04/07/2020 à 09:32
    De Valery
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    Bonjour Nénette,

    Quand vous dites " être au plus près des territoires ", je rajouterai : Sur le papier.

    La COVID-19 a montré l'échec des ARS dans la gestion de la crise sanitaire. Dois-je rappeler qu'en pleine crise, un fonctionnaire de l'ARS avait osé proclamer de supprimer des lits dans le Nord-Est de la France, provoquant la colère des soignants / patients / aidants et même de certains élus ?

    Comme le dit à juste titre le SNPI, beaucoup de fonctionnaires de l'ARS sont hors sol. Quel gâchis d'argent quant on sait que l'AS, l'ASH, l'IDE, la sage-femme, le Kiné, triment sur le terrain pour un salaire de misère.

    Ce système arrive à bout de souffle, certains IFAS n'arrivent même pas à remplir les quotas ! Alerte rouge Madame, monsieur de l'ARS bien au chaud dans sa tour d'ivoire !
  • 04/07/2020 à 09:39
    De Valery
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    Ps : dernirr message adressé à Criducoeur, au temps pour moi :)
    (Et non à Nenette) bonne journée à vous
  • 06/07/2020 à 10:36
    chesnel
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    une cotisation est bien prélevée par URSSAF aux IDE libérales ( sans leur avis ) non pour l'ARS mais pour les URPS (union régionale des professionnels de santé ) dans lesquelles siégent des représentants libéraux que vous élisez à partir de listes présentés par les syndicats libéraux .(peu de libéraux votent et aprés découvrent les structures sensées leur apporter aide )
    Pourquoi s'en prendre toujours au HAD et SSIAD ce n'est pas parcequ'il y a des dérives sur certains territoires que la formule est à rejeter ; il faut de la coopération et du dialogue et l'IDEL doit être dans la boucle à tout moment . Il faut que les IDE soient plus nombreuse à se syndiquer et a faire de la politique .

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