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Le collectif Santé en danger a rendu public, le 21 janvier, les résultats d’une enquête sur la souffrance au travail des soignants. Les réponses recueillies le conduisent à vouloir proposer un texte de loi sur la bientraitance.
« Parmi les 1 877 répondants à l’enquête, 97,3 % témoignent d'une augmentation de leur souffrance au travail depuis qu'ils ont commencé à exercer, dont 59,8 % fortement, résume Sandra Mercier, secrétaire adjointe du CA du collectif, et infirmière de coordination thérapeutique à Toulouse. À l’origine, nous avons lancé cette enquête car à l’échelle de nos pôles ″alerte sanitaire″ présents dans chacune de nos antennes régionales, nous avions de nombreux témoignages inquiétants sur cette souffrance au travail. C’était aussi l’occasion pour nous de disposer de données chiffrées légitimant notre existence, remise en cause par certains. »
Si la crise sanitaire n’explique pas tout, 73,9 % des répondants affirment cependant qu’elle a dégradé leurs conditions de travail. L’enquête révèle également que 74,6 % d’entre eux ont déjà ressenti l'envie de jeter l'éponge et 46,7 % de pleurer sans pouvoir s'arrêter. Plus de 55 % des professionnels de santé se sont déjà sentis en difficulté sur le lieu de leur travail. Pour 80,5 % d’entre eux, cela est lié à un manque de reconnaissance, et pour 71,4 % à un manque en personnel. Parmi les autres causes : l’augmentation des cadences (59,5 % des répondants), les ingérences liées au management (54,1 %) ou encore le harcèlement moral (30,8 %). D’ailleurs, ils sont 39,9 % à avoir consulté un professionnel (médecin généraliste, psychiatre ou psychologue), 38,8 % à avoir été mis en arrêt de travail et 34,2 % à avoir suivi un traitement médicamenteux.
« La souffrance a grandement augmenté chez les soignants répondants, et ce, aussi bien chez ceux qui ont quinze ans d’exercice, que chez les plus jeunes », constate Sandra Mercier. Face à de tels résultats, le collectif a décidé de mettre en place, au premier trimestre 2021, au sein de chacune de ses antennes régionales, de groupes de travail pour reprendre chacun des facteurs de souffrance en pour élaborer des propositions d’amélioration du système de santé. Des groupes qui ont vocation à être hétérogènes avec des paramédicaux, des médecins et des usagers, afin de réfléchir collectivement à ce que le collectif appelle “la santé 2.0”, c’est-à-dire « un idéal pour notre système de santé français, précise la secrétaire adjointe. Aujourd’hui, il présente de nombreuses lacunes. En nous basant sur les travaux des groupes de travail, nous comptons ainsi présenter des propositions aux politiques en vue d’un texte de loi sur la bientraitance ».
Quelques pistes se dégagent déjà, avec notamment la création d’un indicateur de qualité pour les établissements de santé et la mise en place d’un partenariat avec un organisme de formation pour proposer une formation obligatoire à la bientraitance pour les managers, les professionnels de santé et les usagers. « Notre objectif est d’alerter les politiques pour revenir à un système de santé vertueux », conclut Sandra Mercier.
Laure Martin
L’élaboration de l’enquêteLe sondage a été réalisé du 26 novembre 2020 au 10 janvier 2021, via un questionnaire disponible en ligne sur le site Drag’n Survey. 1 877 professionnels de santé de France y ont répondu. 98,6 % sont français, 86,1 % des salariés, principalement des paramédicaux (76,3 %), en très grande majorité des femmes (91,1 %) ayant entre 36 et 50 ans (55,3 %). 67 % d'entre eux travaillent au contact des adultes et possèdent une ancienneté de plus de quinze ans (57,5 %). |