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La proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail ne fait pas l’unanimité chez les infirmières. Si le texte marque une avancée dans la reconnaissance du rôle de la profession, elles souhaitent qu’il évolue sur certains points.
Le 17 février 2021, les députés ont adopté en première lecture la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail, qui fait l’objet d’une procédure accélérée. Désormais, le texte est examiné par le Sénat. Sur trente articles, plusieurs concernent directement les infirmières en santé du travail. La proposition de loi prévoit ainsi l’accès des soignantes au dossier médical partagé (DMP) des salariés, une formation proposée par l’employeur pour celles qui n’ont pas suivi de formation en santé du travail et un exercice en pratique avancée en matière de prévention et de santé au travail pour celles disposant de la qualification nécessaire.
L’Ordre des infirmiers a salué ces avancées, et notamment la consécration par la loi du statut d’infirmière en santé du travail, l’accès au DMP et l’exercice en pratique avancée qui permettrait, par exemple, aux IPA de réaliser la visite de mi-carrière ou encore d’intervenir dans l’orientation du travailleur vers des prises en charge spécifiques si cela s’avère nécessaire. En revanche, le texte ne satisfait pas le Groupement des infirmiers en santé du travail (GIT). « Pour nous, trois points essentiels doivent être pris en compte, explique Nadine Rauch, présidente du GIT. La formation universitaire doit être obligatoire. Depuis 2016, les infirmières effectuent la visite de santé et, pour être pertinente et efficace, celle-ci requiert une formation de qualité. Le deuxième point porte sur la reconnaissance de la spécialité de l’infirmière de santé au travail, comme elle l’est pour le médecin du travail. Enfin, le statut de salarié protégé, qui n’a pas été adopté par les députés, est essentiel pour que l’infirmière ne subisse pas de pressions de la part de l’employeur. » Ce dernier point est également repris par l’Ordre des infirmiers. « Ce statut est important, il permettrait aux salariés d’avoir confiance dans les infirmières de santé au travail qui interviennent auprès d’eux », souligne Patrick Chamboredon, président de l’Ordre.
Pour le GIT, la question de la formation proposée par l’employeur se pose aussi. « Rien n’est précis dans la proposition de loi. Quelle formation pourrait être proposée ? De quelle durée ? Nous avons les mêmes interrogations pour la formation des IPA en matière de prévention et de santé au travail », commente Nadine Rauch. Selon Patrick Chamboredon, il faudra une concertation sur la maquette de formation des IPA. Le président rappelle également que l’Ordre a un rôle de contrôle en matière de DPC et de certification.
Le GIT espère que les sénateurs déposeront des amendements pour améliorer ces points. Dans cette attente, il a lancé une pétition et propose un webinaire, le 2 mars prochain, de 13 h à 14 h 15. « Nous souhaitons que les infirmières s’expriment sur ce sujet », observe Nadine Rauch qui estime que cette proposition de loi reformule finalement ce qui existe déjà. Patrick Chamboredon est, lui, plus nuancé : « Avec ce texte, on change de paradigme car il met en avant la prévention et le rôle que peuvent jouer les infirmières dans ce domaine. » Mais, comme Nadine Rauch, il attend l’examen du texte et son vote par le Sénat.
Magali Clausener