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Maître Fabrice Di Vizio, l’avocat spécialiste des contentieux en santé, mène le combat avec les Ibode auprès de la justice. Ils réclament des masques FFP2 et l’attribution d’une NBI. Avec un franc-parler exacerbé, l’avocat dénonce le refus des directions hospitalières de négocier et leur mépris envers ces soignants.
Maître Fabrice Di Vizio : Le collectif a déposé différentes plaintes partout en France contre les directions d’hôpitaux pour défaut de protection et de sécurité des infirmiers de bloc opératoire. On leur refuse les masques FFP2 alors que la transmission par aérosol du virus ne fait plus débat. On demande des moyens de protection adaptés. Refus. Il n’y a que les personnels anesthésistes qui en ont. Parce qu’ils seraient les seuls au contact des patients. La personne qui dit ça n’a jamais mis les pieds dans un bloc ! C’est un problème majeur en termes de protection, toutes les fumées chirurgicales deviennent source de contamination.
Que le virus est peu létal, quel mépris ! Comment peut-on dire ça alors que les congés sont annulés, que la vaccination est obligatoire pour lutter contre le virus ? Nous avons déjà été entendus par la brigade de répression de la délinquance contre les personnes et par la police judiciaire de Marseille. Le parquet a ouvert une enquête.
On a saisi à peu près tous les tribunaux de France sur la question, contre les centres hospitaliers. Le problème est de savoir si la NBI est dépendante du statut ou de la fonction. Le Conseil d’État dit que c’est dépendant de la fonction et pas du statut. Ce qui compte, c’est ce que je fais, pas ce que je suis. La Direction générale de la santé (DGS) a émis une circulaire dans laquelle elle bloque l’accès à la NBI. Donc, en tant qu’hôpitaux, ils se disent tenus par les circulaires et par les directives de la DGS.
Parce qu’elle dit simplement que les Ibode ne sont pas dans la même situation que ceux qui peuvent y prétendre. Et ils répondent encore autre chose, c’est étrange : ils disent qu’elle est intégrée à la rémunération actuelle. Alors qu’on a la preuve que certains hôpitaux la versent en plus. Une petite dizaine en France. On nous répond que les hôpitaux font ce qu’ils veulent. Qu’on ne peut pas tirer d’un privilège un droit.
Les juges administratifs ont proposé, c’est une super idée, de mettre en place des médiations. Pour faire de l’équité avant de faire du droit. Toutes les directions ont refusé. C’est le paroxysme du mépris. Certains hôpitaux, comme à Rennes, ont pris des cabinets d’avocats parisiens très compétents et très chers. Alors que l’affaire des Ibode n’est pas un problème d’argent, mais de reconnaissance ! Je suis très déçu. Ça coûtait quoi de s’asseoir à une table pour discuter ?
Ce que les directions espèrent, c’est un épuisement à la fin. Elles veulent assécher financièrement et décourager les plaignants. Elles sont régies par la volonté de ne pas créer de précédents. Le principe du conflit social à l’hôpital, c’est toujours le même problème : on ne veut rien lâcher de peur que ça fasse jurisprudence. On refuse de leur donner des masques FFP2, on refuse de leur donner la nouvelle bonification indiciaire, à un moment donné, on veut les envoyer en réa pour lutter contre la Covid. Ce qu’on veut, c’est montrer qu’ils ne sont rien.
Propos recueillis par Thomas Laborde