Le CHU lorrain vient de franchir le cap du centième prélèvement rénal sur donneur vivant par robot chirurgical. L'établissement est aujourd'hui le chef de file européen en la matière.
En 2002, le Pr Jacques Hubert réalisait pour la première fois en Europe un prélèvement rénal sur donneur vivant à l'aide du robot Da Vinci, une machine acquise par le CHU de Nancy en l'an 2000. « A l'époque, nous étions les premiers à expérimenter le robot. Nous avons dû au préalable nous entraîner sur l'animal », précise le chirurgien-urologue.
Depuis, en l'espace de huit années, les choses ont bien évolué : désormais, tous les donneurs vivants de rein bénéficient de l'intervention assistée par robot. De même, côté formation, un diplôme interuniversitaire de chirurgie robotique ouvert aux chirurgiens et aux infirmièr(e)s de bloc opératoire a été mis en place à Nancy.
Le CHU a passé il y a quelques semaines la barre des 100 interventions. En moyenne, deux prélèvements sont effectués par mois. « A Nancy, 25% des greffes de reins s'effectuent à partir de donneur vivant, ce qui est nettement supérieur à la moyenne nationale qui tourne autour de 7 à 8% », souligne le Pr Hubert. Un chiffre qui a toute son importance car les greffes à partir de donneur vivant fonctionnent généralement mieux et plus longtemps que celles pratiquées à partir d'un donneur décédé.
Précision et minutie
Le prélèvement de rein par robot présente de nombreux avantages pour le patient et pour l'équipe médicale. Assis derrière une console, la tête plongée dans un écran, le chirurgien opère à une distance de deux à trois mètres du patient. Il contrôle les trois bras de la machine (deux pour les instruments et un pour l'optique) grâce à des sortes de joysticks sophistiqués et des pédales.
« En plus d'annuler les tremblements physiologiques, le robot permet de gagner en précision et en minutie », explique le Pr Hubert (ci-contre). À la différence de ce qui a lieu en chirurgie cœlioscopique traditionnelle, le robot n'inverse pas les mouvements du chirurgien, et la caméra, dotée de deux canaux optiques, offre une vision tridimensionnelle.
Pour les infirmières, les changements apportés par une telle machine sont moins importants : « Seuls les instruments sont différents, une fois qu'on les maîtrise, ce n'est pas trop compliqué », assure Amélie Bedu, Ibode. « Nous sommes habilités à changer les plaques fixées sur les bras du robot pour éviter que le chirurgien ne se déplace depuis sa console. »
Pour le patient, la chirurgie robotique se traduit par une douleur post-opératoire atténuée, une convalescence plus courte (les donneurs quittent l'hôpital au 4e ou 5e jour) et une reprise d'activité plus rapide (de 4 à 6 semaines contre 12 semaines pour une lombotomie classique).
Étude comparative
Afin de comparer les trois différentes méthodes de prélèvement utilisées actuellement en France (la chirurgie conventionnelle dite « ouverte », la chirurgie cœlioscopique dite « par trous de serrure » et la chirurgie mini-invasive par robot), une étude va être lancée à partir du mois de mai. Financée dans le cadre du programme Stic (soutien aux technologies et innovations coûteuses) du ministère de la Santé, elle sera coordonnée par le CHU de Nancy et fera participer au total 24 centres hospitaliers français. « Cette étude visera à comparer les différentes méthodes tant sur le plan de la qualité de vie du patient que sur le plan financier », indique le Pr Hubert.
A Nancy, en plus de l'urologie, le robot est utilisé en chirurgie cardiovasculaire, digestive et endocrinienne, ainsi qu'en cancérologie gynécologique.
Aurélie Vion
Photos: CHU de Nancy (en haut et à droite) et Aurélie Vion.