Une directive portant sur la prévention des blessures par objet tranchant en établissements sanitaires et sociaux doit être transposée avant le 13 mai dans la législation nationale. Les infirmières sont en première ligne.
La prévention des accidents exposant au sang sera bientôt une obligation réglementaire pour les établissements sanitaires et sociaux. C’est l’Union européenne qui l’impose, à travers une directive adoptée en 2010, qui doit être transposée dans tous les États membres avant le 13 mai. Elle vise à « prévenir les blessures occasionnées aux travailleurs par tous les objets tranchants à usage médical (y compris les piqûres d’aiguilles) ».
Matériel sécurisé
Sa transposition est déjà effective aux Pays-Bas, en Suède et en Autriche, et devrait l’être dans les jours à venir au Danemark, en Lettonie, au Royaume-Uni ou en Finlande, selon les résultats d’une enquête réalisée par les syndicats européens Hospeem et FSESP, signataires de la directive. En France, un décret est en cours de préparation, mais aucune date de parution n’est encore annoncée.
La directive européenne est ambitieuse. Elle fixe comme « condition préalable » la mise sur pied d’un « processus complet d’évaluation des risques ». « L’analyse des risques est le minimum requis », commente Fiona Garin, directrice chez BD Europe, principal fournisseur de matériel sécurisé, qui a organisé, jeudi 18 avril, à Paris, un symposium dédié à la prévention des accidents exposant au sang (AES). « Les établissements doivent se focaliser sur les procédures où interviennent des objets piquants, et s’équiper de matériels sécurisés lorsque le risque d’accident est jugé important. » Parmi différentes mesures de prévention, la directive évoque, en effet, « l’utilisation de l’équipement le plus sûr ».
Retard de la France
Mais, d’autres mesures sont apparues aussi « essentielles à la réussite de la transposition » par les 90 participants originaires de neuf pays du nord de l’Europe réunis à Dublin fin janvier par les syndicats Hospeem et FSESP : la création d’un organe de surveillance des données au niveau national, la constitution dans les établissements de comités chargés d’évaluer les risques, ou encore l’harmonisation des formations des soignants. L’interdiction de la pratique du recapuchonnage ou encore la vaccination gratuite des professionnels de santé ont aussi été jugées souhaitables.
La France est en retard à double titre, puisque sa transposition se fait attendre, mais surtout parce qu’il n’existe, aujourd’hui, aucune législation contraignante sur la prévention des accidents exposant au sang. La surveillances des AES en établissements de santé reste facultative : en 2010, seuls 29 % des établissements de santé, représentant 59 % des lits, ont signalé des AES au Réseau d’alerte, d’investigation et de surveillance des infections nosocomiales (Raisin), auteur d’un rapport annuel. Ces établissements sont généralement équipés de dispositifs sécurisés, mais le secteur privé est en retard par rapport au public.
Les infirmières impliquées dans 47,2% des AES
Plus grave : dans le milieu libéral, il n’existe aucune donnée, pas d’action de prévention ou même d’accès aisé à du matériel sécurisé. Pour ces professionnels, la directive européenne ne va rien changer puisque son champ d’application est limité à « tout endroit où se déroulent et sont dispensés des services/activités de santé sous l’autorité et la supervision de l’employeur ».
Selon le rapport 2010, rendu public début avril, les infirmières restent les premières victimes des AES : en 2010, elles étaient impliquées dans 47,2 % des accidents signalés. Les Ibode sont les plus exposées, si l’on rapporte le nombre d’accidents à celui des professionnels : 14,7 % d’entre elles ont rapporté un AES en 2010, contre 5,7 % des IDE, 3,2 % des Iade, 1,5 % des aides-soignants ou encore 2,1 % des médecins (1).
Caroline Coq-Chodorge
1- Pour aller plus loin, lire l'article à paraître dans L'Infirmière magazine n°322, daté du 1er mai.