Titre de l'image

25/09/2024

ACCUEIL MITIGÉ POUR LA NOUVELLE MINISTRE DE LA PART DU MONDE INFIRMIER

La santé a enfin une ministre en la personne de Geneviève Darrieussecq. Son statut de ministre de plein exercice, que n’avait pas son prédécesseur Frédéric Valletoux, est salué par les représentants infirmiers, mais pour le reste, les réactions sont très désabusées. De très nombreux dossiers attendent un passage à l'action.

Tout vient à point à qui sait attendre. C’est ce que pourraient se dire les infirmiers qui, après des mois d’attente, voient depuis le 21 septembre le ministère de la Santé pourvu d’une cheffe : Geneviève Darrieussecq, membre du Modem et jusqu’ici députée des Landes. Entre la pratique avancée, le chantier de la refondation de la profession, la crise de l’hôpital ou encore des négociations conventionnelles à venir, les sujets de discussion ne manquent pas entre la profession et la nouvelle occupante de l’avenue Duquesne. Mais au lieu du soupir de soulagement attendu, c’est une forme de colère mêlée d’amertume qui semble monter du côté des représentants infirmiers.

Le profil de la nouvelle arrivante pourrait cependant avoir de quoi rassurer les soignants. Contrairement à certains des membres de la nouvelle équipe gouvernementale qui ont hérité d’un portefeuille dans un domaine où ils n’avaient pas de légitimité particulière, Geneviève Darrieussecq connaît bien le monde de la santé : médecin allergologue de profession, elle s’est impliquée dans l’organisation du système de santé notamment au sein de la Fédération hospitalière de France (FHF), l’organisation qui défend les intérêts des hôpitaux publics. On peut par ailleurs noter que parmi les trois maroquins ministériels qu’elle a détenus depuis 2017 figure celui des Personnes handicapées, dans le gouvernement d’Élisabeth Borne.

La nouvelle ministre a d’ailleurs immédiatement tenté de jouer sur la légitimité que lui donnait son cursus. « Je me sens à ma place parce que c'est un domaine que j'affectionne, que je connais », a-t-elle déclaré sur France Bleu Gascogne au lendemain de sa nomination. Consciente de ne pas avoir hérité des dossiers les plus faciles, elle a ajouté estimer que « l'enjeu, c'est que les Français puissent se soigner correctement », ce qui constitue « une feuille de route qui sera dense » et qui « suffit à remplir [ses] journées ».

PLUS QUE DE BELLES PAROLES

Reste que du côté des infirmiers, on attend bien plus que des belles paroles : depuis la dissolution décidée au mois de juin, qui a entraîné la suspension de tous les travaux législatifs et réglementaires, les syndicats et autres associations qui représentent la profession avaient rivalisé de communiqués alarmistes appelant à mettre fin au plus vite à l’inaction dans laquelle le pays était de facto plongé. De nouveaux communiqués ont fleuri pour prendre acte de la nomination de Geneviève Darrieussecq, et la plupart d’entre eux mettent l’accent sur l’urgence du passage à l’action.

C’est ainsi que l’Ordre national des infirmiers (ONI) a rappelé que cette nomination intervient après « une nouvelle crise estivale des urgences hospitalières », dans un pays où « sept millions de Français […] sont sans médecin traitant », ce qui fait de « la reconnaissance et l’évolution » des missions infirmières « une priorité urgente ». Et l’ONI de rappeler que deux textes clé-en-main attendent la signature de Mme Darrieussecq, l’un sur l’accès direct et la primo-prescription des Infirmiers en pratique avancée (IPA), l’autre sur les plaies et cicatrisation, et qu’un chantier sur « la réforme de la profession infirmière » est en cours.

Mais si le communiqué ordinal est empreint d’une forme d’optimisme, ce n’est pas le cas de tous ceux qui ont été publiés par les organisations infirmières, notamment du côté syndical. « Le temps des promesses est révolu, a ainsi déclaré Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI), dans un message diffusé par son organisation. La profession est à bout, et sans réponse concrète, le risque est grand de voir l’hôpital public s’effondrer encore un peu plus. » Tout au plus le SNPI reconnaît-il comme une bonne nouvelle le fait que la Santé a regagné son statut de ministère de plein exercice, perdu lors du dernier remaniement.

ACTION URGENTISSIME

De son côté, le syndicat Convergence infirmière (CI), qui représente les libéraux, affirmait dans son propre communiqué qu’il est « urgentissime d’agir concrètement pour les Idels », déplorant que la valse des ministres depuis plusieurs années rende « très difficile le travail de fond sur la durée » et signalant que le secteur est « encore et toujours dans l’attente » d’évolutions importantes. « Nous attendons l’ouverture des négociations conventionnelles, avec des revalorisations à la clé », déclare à L’INFIRMIÈR.E Ghislaine Sicre, présidente du syndicat, soulignant que son organisation avait suggéré des pistes d’économies, notamment sur le gaspillage, qui permettent selon elle de financer au moins en partie les investissements nécessaires.

Du côté de la Coordination nationale infirmière (CNI), le ton est tout aussi alarmiste. « J’aimerais être sûr que cette ministre pourra mener à bien les projets de sa feuille de route, déclare ainsi son président, Christophe Mesnier. Nous sommes face à un malaise tant du point de vue des usagers du système de santé que des soignants, et je crains que malheureusement, les moyens ne soient pas en adéquation avec les ambitions affichées. »

Car il faut se souvenir que non seulement le premier ministre Michel Barnier, en arrivant à Matignon, avait déclaré avoir « découvert » une situation budgétaire « très grave » qui nécessiterait des efforts, mais que de plus, ce gouvernement ne dispose que d’une minorité de députés très fragile pour faire voter ses textes. Il est donc sur un siège éjectable. D’où l’urgence plus grave encore de la situation. « Il faut trouver un ou deux sujets sur lesquels la ministre peut avancer très vite, suggère Ghislaine Sicre. Pour les négociations conventionnelles, par exemple, il suffit qu’elle signe une lettre de cadrage. » Mais il n’est pas sûr que tous les dossiers sur le bureau de Geneviève Darrieussecq puissent être réglés d’un simple et rapide trait de plume.

Adrien Renaud

À découvrir

Toutes nos formations pour les professionnels de santé.

- Gestes & soins d'urgence
- Douleurs
- Management
- Droit & éthique
- SST
- Santé mentale & handicap


Télécharger le catalogue
Feuilleter le catalogue