Aller à la rencontre des personnes précaires atteintes de troubles psychiques

Diplômée depuis dix ans, Sophie Desrousseaux a rejoint il y a deux ans MARSS (Mouvement et Action pour le Rétablissement Sanitaire et Social). Aujourd'hui, ce dispositif est à la fois une équipe de l'AP-HM composée d'une quinzaine de salariés et un mouvement qui comprend de nombreux citoyens volontaires qui participent à différentes actions ayant toutes pour objectif plus de justice sociale. La structure est née en 2005 d'une rencontre entre deux pratiques : celle de la psychiatrie communautaire de rue, développée aux Etats-Unis dans le cadre d'un projet de recherche rattaché à l'université de Yale, et celle de la réduction des risques à Marseille, dans la rue également, mis en place par l’ONG Médecins du Monde. L’EMPP est rattachée au service du Professeur Christophe Lançon de l’AP-HM. Sa mission est d’aller en rue vers les personnes les plus éloignées du soin. « Nous réalisons un travail de rue spécialisé auprès des personnes très vulnérables qui ont des troubles psychiques, souligne Sophie Desrousseaux. Cela se fait sur la base de signalements de nos partenaires du travail de rue comme l’Accueil de jour et nuit (ADJN) à Marseille ou la Nouvelle Aube une association qui travaille sur la réduction des risques et la promotion de la santé auprès d’un public jeune, fragilisé et stigmatisé. Nous pouvons aussi avoir des signalements par des riverains ou par l’Agence Régionale de Santé. Nous nous déplaçons à plusieurs dans une journée de manière non sectorisée sur différents territoires de Marseille qui sont identifiés. » Un environnement que Sophie Desrousseaux connaît bien puisqu’elle a été bénévole à l’Aube avant de rejoindre MARSS.

C’est une équipe pluridisciplinaire de sept personnes qui réalise les tournées quotidiennes. Infirmière, psychiatre, travailleurs sociaux (éducateur, assistante de service social), psychologue, travailleurs pairs… « Nous suivons une approche globale selon l’axe du rétablissement sanitaire et social qui s’appuie sur une approche progressiste de la psychiatrie et se cale sur la temporalité de la personne qui est en situation de vulnérabilité, précise l’infirmière. Nous sommes là pour lutter contre la stigmatisation de la très grande précarité et des troubles psychiatriques en allant au plus près de la personne et en écoutant ses besoins. Le but est de rompre son isolement et de lui apporter de l’espoir. C’est vraiment une approche globale qui respecte la temporalité de la personne vulnérable à la rue alors que l’hôpital est très médico-centré et suit la temporalité des médecins ! Je travaille avec des pair-aidants afin de créer du lien et des connections. Je suis convaincue que cela apporte une plus-value. Cela permet de montrer que l’on peut sortir de la crise.Ici, dans l’équipe MARRS, je suis vraiment dans le care, c’est une philosophie de l’action avec laquelle je suis en parfait accord. »  Troubles psychiques, maladies chroniques, addictions, les portes d’entrée sont multiples. Ainsi l’EMPP de l’AP-HM agit dans les situations où l’éloignement aux soins est extrême et les moyens nécessaires pour la prise en charge sont pluridisciplinaires. Sara Paiero, assistante sociale, a rejoint l’équipe qui travaille de manière horizontale, il y a un an. « Je m’occupe des demandes sociales, comme le logement, l’ouverture des droits, les démarches administratives pour la demande de papiers, confie-t-elle. Nous n’avons pas de bureau, je me déplace avec mon ordinateur portable auprès des personnes dans la rue. Ici, tout le monde fait tout. » À ce jour, la structure suit une file active de soixante-dix personnes à Marseille.

Isabel Soubelet