L'association interpelle le ministère sur l'écart croissant entre les bourses perçues par les étudiants "ordinaires", rattachés aux Crous, et celles versées aux étudiants infirmiers, qui dépendent des régions. Explications avec Thomas Chrétien, président de la fédération.
Dans un récent communiqué, intitulé «Etudiants en soins infirmiers: les oubliés des aides sociales», vous vous prononcez pour confier la gestion des bourses des étudiants infirmiers aux Crous, et non plus aux régions. Pour quelles raisons?
Nous réaffirmons notre opposition à une organisation que nous dénonçons depuis plusieurs années. En 2005, les bourses des étudiants paramédicaux ont été confiées aux régions (1) et réévaluées aux mêmes échelons que celles des Crous. Mais, le temps passant, les situations ont divergé. Dans certaines régions, aucune réévaluation systématique n'a été imposée, alors que dans le même temps, les bourses des Crous ont augmenté de 14%, tenant compte du coût de la vie. Dans d'autres régions, les bourses ont été réévaluées, et des échelons zéro et six ont été créés. Mais aucune région n'a véritablement réussi à s’aligner sur les Crous.
Il ne s'agit pas pour nous de leur jeter la pierre, car elles mènent de façon générale des politiques favorables aux formations sanitaires. Nous constatons simplement qu'elles n'ont pas les moyens d'une telle réévaluation. Le résultat est qu’en plus des disparités qui existaient déjà entre étudiants de l'enseignement supérieur et étudiants infirmiers, nous voyons apparaître des inégalités entre les étudiants infirmiers des différentes régions. Tant qu'il n'y aura pas de cadrage national, ces différences persisteront.
Vous signalez qu'en dehors des bourses sur critères sociaux, les étudiants universitaires bénéficient d'autres services auxquels les étudiants infirmiers n'ont pas accès. Lesquels?
Les étudiants de l'enseignement supérieur bénéficient du fonds national d'aide d'urgence [créé en 2007 pour venir en aide aux étudiants faisant face à une situation exceptionnelle ou particulière et ne pouvant prétendre à une bourse sur critères sociaux, ndlr]. Ce fonds attribue des bourses de façon annuelle ou ponctuelle. Pour les étudiants infirmiers, ce n’est possible que ponctuellement.
Autre problème, celui des restaurants universitaires. En théorie, ils sont ouverts à tous les étudiants, mais en pratique, dans les endroits où l'on y accède à l'aide d'une carte multifonctions (de type Monéo, avec le logo du Crous et celui de l'université), les étudiants infirmiers, qui ont une carte d’étudiant papier, ne peuvent pas entrer...
D'autre part, pour attribuer les logements (résidences universitaires, etc.), les Crous ont certains critères... et pour passer en tête de liste, il faut être boursier au Crous. Les étudiants infirmiers sont donc traités au cours d'une deuxième vague.
Cette situation a de quoi surprendre, à l'heure du LMD et du rapprochement entre Ifsi et universités...
C'est l’une de nos grandes revendications, à la Fnesi: nous nous battons pour une intégration universitaire bien plus franche. La réforme de la formation infirmière [entamée à la rentrée 2009] a pris en compte la pédagogie, mais pas la vie étudiante, l'aspect social, ou encore la démocratie au sein des Ifsi. Sur ce dernier point, nous voudrions que les conseils pédagogiques (où siègent des étudiants) soient dotés d'un pouvoir décisionnel, comme dans les conseils qui régissent les universités. Actuellement, seuls les directeurs d'Ifsi sont dotés de ce pouvoir.
Pour cette raison, nous souhaitons que les Ifsi passent sous une double tutelle, non seulement du ministère de la Santé, mais aussi du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. De façon plus large, nous nous battons pour soit mis en place un vrai domaine de santé, de la licence au doctorat, avec des effets bénéfiques en termes de savoirs, d'attractivité et de reconnaissance sociale.
Propos recueillis par Nicolas Cochard
Photo: N.C.
1- La loi de décentralisation du 13 août 2004 « relative aux libertés et responsabilités locales » a transféré la gestion des Ifsi aux conseils régionaux. Auparavant, les bourses étaient versées par les Ddass.