Alors que cette date est chaque année l’occasion de célébrer une profession aimée de tous, ce jeudi 12 mai, la Journée internationale des infirmières servira de caisse de résonnance aux soignantes françaises et aux étudiants pour exprimer inquiétudes et revendications.
Les étudiants ont, les premiers, ouvert les hostilités, exaspérés qu’ils sont par la mise en œuvre « chaotique » de la réforme des études infirmières depuis 2009. A l’appel de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (Fnési), venus de toute la France, ils défileront à Paris à partir de midi. Rendez-vous est pris sur le parvis de la gare Montparnasse. Le cortège, composé, espère la Fnési « de 5 000 à 10 000 étudiants », se dirigera vers le ministère de la Santé, où une délégation doit être accueillie vers 15h.
Reçus au ministère le 2 mai, les étudiants n’auront certes pas été apaisés par les propos d’une conseillère du cabinet de Xavier Bertrand, laquelle leur a cyniquement signifié que le cabinet ne financerait « pas l’augmentation d’une enveloppe budgétaire allouée aux bourses des formations sanitaires et sociales à des régions de gauche (...) qui en retireraient tout le mérite » car « politiquement ce n’est pas le bon moment »…
Egalité de traitement
Plus remontés que jamais, les étudiants infirmiers revendiquent l’égalité de traitement avec leurs congénères de l’université dont les bourses, revalorisées chaque année, sont aujourd’hui 20% supérieures aux leurs, selon la Fnési, qui demande donc « le transfert de nos bourses de la région au Crous » et « l’accès complet à l’ensemble des services de l’Université » (bibliothèques universitaires, équipements sportifs, services de médecine universitaire, etc.).
En ce qui concerne le nouveau référentiel de formation, la Fnési estime que « les cours dispensés ne sont pas adaptés » à la formation infirmière, étant « trop souvent axés sur le médical ». Le développement du recours aux supports numériques d’enseignement comme le e-learning ou les cours sur DVD ne les satisfait pas davantage dans la mesure où « aucune question ne peut être posée au professionnel car il n’y en a pas ».
Des tuteurs dépassés
Autre gros point noir, les stages : la Fnési dénonce des tuteurs « trop peu formés au portfolio ». « Ils ne savent pas le remplir », constate l’organisation qui réclame une formation à la réforme pour les tuteurs de stage ainsi qu’une indemnisation des stages conforme à ce que prévoit la loi d’égalité des chances pour les stages de plus de huit semaines.
La Fnési a créé pour l’occasion un site internet où sont détaillées ses revendications et projets d’action : esionsbougeait.fnesi.org.
Formateurs remontés
Dans ce mouvement de révolte contre le sort qui leur est fait, les étudiants infirmiers sont soutenus par leurs formateurs et directeurs d’établissements puisque le Cefiec s’associe à leur mobilisation.
En cette Journée internationale des infirmières, les cadres formateurs sont par ailleurs appelés à se mettre en grève par le SNPI CFE-CGC. En ligne de mire, le rapport Yahiel-Mounier sur l’avenir de la formation des cadres hospitaliers. Pour le syndicat, ne se dégagent de ce rapport que « méconnaissance » et « mépris » pour la fonction de cadre formateur. Le syndicat a donc déposé pour ce jeudi un préavis national de grève pour réclamer « l’abandon des recommandations du rapport » assorti de la reconnaissance à part entière de la fonction de cadre formateur et de ses compétences spécifiques, mais aussi « la réingénierie du diplôme de cadre de santé en master » avec VAE pour les professionnels en exercice.
Plan d'urgence
Enfin, c’est toute la profession infirmière qu’entend mobiliser un autre syndicat, la Coordination nationale infirmière en appelant « l’ensemble des étudiants en soins infirmiers, infirmiers, infirmiers spécialisés, cadres de santé, cadres supérieurs de santé et directeurs de soins de la Fonction publique hospitalière » à des actions locales. Au chapitre des revendications, la CNI exige « un plan d’urgence pour gérer la pénurie d’IDE dès cet été » et « une véritable revalorisation salariale au regard des compétences et des responsabilités » au sein des trois Fonctions publiques, sur une grille A type. La CNI réclame en outre « la reconnaissance de la pénibilité de la profession infirmière avec le maintien de la catégorie active en fonction publique », « l’augmentation de la prime de week-end et une revalorisation conséquente de la prime de nuit », sans oublier « de véritables bourses » et les mêmes droits universitaires que les autres pour les étudiants infirmiers. Le syndicat a édité une lettre type reprenant toutes ces revendications et appelle les infirmiers et futurs infirmiers à l’adresser en masse au président de la République, lui qui avait rendu hommage aux soignantes, « héroïnes du quotidien » à son arrivée au pouvoir en 2007. Et la CNI de dresser un bilan cinglant de la situation des infirmières depuis : un simple « grade de licence » en lieu et place de la licence universitaire annoncée, une catégorie A « spécifique » à la profession infirmière plutôt qu’ « une grille salariale A type » dans la Fonction publique, « la fermeture du dispositif qui permettait un départ des fonctionnaires parents de trois enfants après 15 années de service »…
Parmi les actions menées en différents points de l’Hexagone, citons la mise à feu symbolique de la pénibilité infirmière, sacrifiée sur l’autel de la catégorie A, prévue à Marseille devant l’hôpital de La Timone vers midi. Ailleurs, des ateliers bien-être et massages seront organisés pour inciter les infirmières à « prendre soin d’elles », explique la présidente de la CNI Nathalie Depoire ou encore, comme au Centre Hospitalier de Belfort-Montbéliard un café-rencontre et une exposition sur la profession infirmière à travers le temps à partir d’images d’archives.
Cécile Almendros