Souvent offerts aux jeunes mamans par le personnel médical, les cosmétiques bébés sont un véritable cocktail de produits toxiques. Les pouvoirs publics restent indifférents.
Lingettes Nivea Baby. Mixa Bébé. Lingettes Pampers. Ces produits pour bébés – la liste n’est pas exhaustive – sont gracieusement offerts par les industriels aux jeunes mamans dans les 600 maternités françaises, grâce à un personnel médical ravi de faire un cadeau aux parturientes : ce sont les « boîtes roses », « boîtes bleues », et autres « baby trouss ». « Inacceptable ! On empoisonne les enfants ! », tonne le professeur Dominique Belpomme, cancérologue et membre du Comité pour le développement durable en santé (C2DS).
Groupement indépendant de professionnels de santé, le C2DS s’est penché sur la composition de ces cadeaux offerts par les blouses blanches. Le cocktail est explosif : parabens, EDTA, BHA, PEG, bisphénol A… D’une toxicité extrême et avérée, ces produits, parfois neurotoxiques et allergisants, sont à l’origine de cancers, de malformations congénitales et de stérilités.
« Chez l’enfant européen, les cancers augmentent de 1 % par an, s’inquiète André Cicollela, chimiste toxicologue. On sait que cette maladie trouve son origine dans les périodes de gestation et néonatale. » D’autant que « le fœtus et le nourrisson sont les personnes les plus vulnérables de notre société », rappelle Dominique Belpomme. Le professeur souligne qu’en outre, les cosmétiques sont utilisés par voie cutanée : « La pénétration est très importante, beaucoup plus que par les voies pulmonaire et alimentaire qui possèdent leurs propres moyens de défense. »
L’attitude des autorités sanitaires inquiète les membres du C2DS : « Elles attendent d’avoir la preuve de la toxicité chez l’homme, alors que la règle devrait être l’application du principe de précaution », insiste Francis Glemet, pharmacien industriel.
Alors que les médicaments sont soumis à une autorisation de mise sur le marché qui prend en moyenne une dizaine d’années, les cosmétiques ne connaissent pas d’obstacles à leur commercialisation : l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) se contente d’édicter des recommandations à caractère non contraignant. « Cette frilosité est inacceptable en termes de santé publique », dénonce André Cicollela.
Il regrette que les cosmétiques échappent au règlement européen REACH, qui a pourtant pour objectif d'offrir au public une meilleure protection vis-à-vis des substances chimiques. Sans parler du Grenelle de l’environnement, où selon les membres du C2DS, « la santé a été bradée ».
Dans les semaines à venir, le C2DS va alerter les maternités françaises pour que leur personnel cesse de distribuer ces produits aux jeunes mères. Contactés, une vingtaine d’établissements ont déjà mis fin à ces pratiques. Informées par le personnel médical, les familles doivent impérativement refuser ce type de produits.
Mais la réponse est avant tout politique : le C2DS appelle les pouvoirs publics à élaborer une procédure de mise sur le marché des cosmétiques bébés. A respecter le principe de précaution en somme, qui, depuis 2005, est inscrit dans la Constitution.
Lou Duganel