IDE en région parisienne, Aurélien a choisi la seringue, « son arme de prédilection », pour emblème. Son blog, www.seringue.net, est un savant mélange d’actualités et de récits personnels. C’est l’invité du mois de L’Infirmière magazine.
Nous sommes légion, tout en blanc, servant de petites mains pour les grands docteurs qui inscrivent leurs ordres sur des prescriptions qu’il faudra déchiffrer et expliquer aux patients. Lors de mes cinq premières années d’exercice infirmier, j’ai connu deux aspects du métier : le côté soignant, accompagnant le patient dans sa longue sortie de l’enfer de la maladie; puis le côté obscur, celui du faisant fonction de cadre de santé de deux unités. Après tout, avant d’entrer à l’Ifsi, j’avais bien commencé en tant qu’ASH à mes 18 ans, passant même au standard, pour ensuite travailler quatre ans de nuit en tant qu’agent incendie. Au sein du même hôpital, j’ai avancé échelon par échelon.
Mais pourquoi changer de cap et endosser le rôle du contrôleur, de celui qui dicte la vie de chacun en les tenant grâce aux plannings, qui dit «oui » ou « non », dont on dira que « c’est forcément de sa faute » quand une nouveauté sera mise en place, qu’on regardera d’un mauvais oeil quand il criera trop fort? Je suis infirmier mais je suis touche-à-tout. J’aime l’encadrement, le travail bien fait et les nouveaux défis, alors j’ai accepté ce poste. Curieux de savoir ce que peut bien faire un cadre dans son bureau, de comprendre pourquoi on ne le voyait jamais dans le service ou trop souvent avec une tasse de café à la main.
J’ai découvert pourquoi on pouvait dire non à des équipes : parce qu’il est difficile de trouver des intérimaires, parce qu’il faut inscrire sa demande d’équipement sur le plan de l’année suivante, parce que tout le monde ne peut pas poser la même semaine de congé. J’ai compris pourquoi on était souvent derrière eux. La pression vient encore de plus haut et ce sont bien les cadres qui doivent tout gérer pour que ça aille au mieux dans un service.
Ah! J’ai assisté à des réunions longues et interminables, à des groupes de travail, à des comités divers et variés. Je me suis pris la tête avec du personnel et j’ai sûrement pris la leur en retour. Mais cela m’a fait prendre conscience d’une autre réalité en dehors du soin, ce qui me servira certainement pour la suite… Car je n’ai pas continué. Cela a duré dix-huit mois. Je préfère retourner au plus près du soin. Le contact avec les patients, les prises en charge, le relationnel et les soins techniques me manquent. C’est pourquoi je remets ma blouse blanche, mon sparadrap, mes ciseaux et ma pince Kocher dans ma poche et je rejoins le premier maillon de la chaîne à l’hôpital : le service des urgences.