17/09/2015

Surprésentéisme, attention, danger !

Plus de la moitié des Français mettent en danger leur santé chaque année sans le savoir ! Comment  ? En pratiquant le surprésentéisme, c’est-à-dire en travaillant alors qu’ils sont malades. 

En moyenne, un salarié français effectue 10 jours de surprésentéisme par an. Ce phénomène indique que les abus en matière d’arrêt de travail sont moins importants que ce que certains voudraient croire. À côté des cas de fraude, il y a des salariés et des travailleurs indépendants qui refusent de s’arrêter alors que leur médecin généraliste le leur recommande afin de se soigner pour pouvoir revenir au travail en bonne forme.

Parmi les professions championnes du surprésentéisme, on retrouve… le personnel soignant. S’il existe peu de statistiques sur ce sujet en France (car nous nous focalisons uniquement sur le phénomène inverse, l’absentéisme), ce constat est vérifié aussi bien en Amérique du Nord que dans les pays scandinaves où 80 % du personnel médical y déclare avoir fait du surprésentéisme dans l’année. Plus grave, des études montrent que plus des deux tiers ont des symptômes contagieux comme la grippe, des infections respiratoires ou la gastro-entérite. Or, ce surprésentéisme des professionnels de santé a une incidence sur les infections nosocomiales : la durée d’une épidémie est d’autant plus longue que le personnel s’arrête peu de temps de travailler.

Pourquoi médecins et infirmières ont-ils tendance à travailler même lorsqu’ils sont malades ? Un sondage réalisé récemment au sein d’un hôpital américain apporte quelques éléments de réponse (2) : tout d’abord pour ne pas faire défaut à leurs collègues, ensuite pour être présents pour leurs patients, puis par crainte d'être mal vus par leurs confrères et, enfin, par souci de la continuité des soins. Ce qui pose problème en toile de fond est donc la pression sociale et le remplacement du personnel en arrêt maladie.

Toutes les études médicales longitudinales montrent que cette pratique dégrade l’état de santé à moyen terme. Car la maladie est un moyen pour le corps de dire «  stop !  », c’est-à-dire d’alerter sur un déséquilibre. Ignorer ces symptômes revient donc à s’exposer à une pathologie plus lourde. Par exemple, venir travailler plus de cinq fois dans l’année tout en étant malade augmente le risque de connaître un arrêt maladie supérieur à trente jours dans les années qui suivent. Dans les cas les plus graves, le surprésentéisme débouche d’ailleurs sur un burn-out.

Il peut sembler rentable pour l’employeur que le personnel soignant fasse du surprésentéisme. En réalité, cela accroît les risques de contagion, d’erreurs d’inattention et d’accidents, ainsi que, à moyen terme, les arrêts maladie de longue durée. Gardons donc toujours en tête que «  qui veut voyager loin ménage sa monture !  ».


1- Le surprésentéisme, Éd. De Boeck, 2013 ; L’absentéisme au travail, Afnor, 2015.

2- Julia E. Szymczak et al., « Reasons why physicians and advanced practice clinicians work while Sick: a mixed-methods analysis », Jama Pediatrics, juillet 2015.

Dennis Monneuse, sociologue, chercheur associé à l’IAE de Paris, directeur du cabinet de conseil « Poil à gratter » et auteur de plusieurs ouvrages (1).

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