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11/05/2023

Décarboner la santé pour soigner durablement

Avec 49 millions de tonnes de CO², les émissions du secteur de la santé représentent 8 % de l’empreinte carbone de la France. Une part non négligeable qui nécessite la mise en place d’actions planifiées en matière de transition écologique.

Alors que le think tank The Shift Project a publié en novembre 2021 son rapport « Décarboner la Santé pour soigner durablement »(1) dans le cadre du Plan de transformation de l’économie française (PTEF), il vient de sortir mi-avril une V2(2) de ce rapport final. Les données confirment l’importance d’agir afin de pouvoir continuer à soigner durablement. Si on se place à l’échelle mondiale, l’empreinte carbone du système de santé, incluant l’ensemble de la chaîne des fabricants de médicaments aux hôpitaux, est équivalente à celle des secteurs de l’aérien et du maritime réunis. Un enjeu de taille qui devrait accélérer la décarbonation.

Deux conséquences majeures

L’équipe menée par Laurie Marrauld, cheffe de projet Santé pour The Shift Project et maîtresse de conférences en santé publique à l’EHESP, a mis en évidence deux conséquences majeures. D’une part, il va falloir réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) et chercher des substituts aux ressources fossiles. D’autre part, il faudra gérer les conséquences de la dégradation des écosystèmes et des crises climatiques sur la santé des populations et les infrastructures de soin : propagation de maladies, augmentation des températures, aggravation des inondations et des sécheresses. « Le système de santé dispose de postes de décarbonation possibles et on sait que chaque acteur a son rôle à jouer dans cette démarche et l’adoption de nouvelles pratiques », souligne Laurie Marrauld. En effet, tous les acteurs de la santé sont concernés par les émissions de GES. Les établissements hospitaliers (38 %) comme la médecine de ville (23 %), les établissements et services pour enfants et adultes handicapés (17 %) ou pour personnes âgées (21 %), et l’administration et les complémentaires santé (1 %). Si on prend en compte la répartition des GES selon chaque poste, ce sont les achats de médicaments (29 %) qui arrivent en tête. Puis viennent les achats de dispositifs médicaux (21 %), l’alimentation (11 %), les transports des usagers et des visiteurs (9 %), les immobilisations (8 %), les déchets et services (5 %), les trajets domicile-travail et les déplacements professionnels (4 %). Les postes consommations de gaz médicaux et climatisation atteignent 2 % tout comme ceux d’électricité, froid et chaleur.

Pistes d’amélioration et solutions  

Aujourd’hui, de nombreuses actions sont mises en place dans des établissements. On peut citer le Centre Hospitalier de Niort qui a réduit de 33 % ses rejets en dix ans en changeant son système de chauffage, construisant un bâtiment à énergie positive, réduisant le gaspillage alimentaire et équipant ses salariés de véhicules hybrides et électriques. À Marseille, au bloc opératoire de la Timone (AP-HM), on n’utilise plus le protoxyde d'azote, au regard d'une toxicité potentielle pour les patients et de nombreuses études cliniques sur l’absence de bénéfice clair pour leur prise en charge. Mais aussi, du fait du caractère polluant de ce gaz, qui une fois rejeté à l’extérieur mettra plus de 100 ans à se dégrader avec un impact 265 fois plus élevé que le dioxyde de carbone, contribuant à la détérioration de la couche d’ozone et à l’augmentation de l’effet de serre. Par ailleurs, en janvier, la « Green Team » constituée au sein du service de médecine interne de la Timone a réalisé pendant trois semaines un test sur les déchets alimentaires et le service est désormais pilote pour le tri des biodéchets. Il parvient à en collecter chaque jour 21 kg à midi et 28 kg le soir. Tous les étudiants amenés à effectuer un stage dans le service sont sensibilisés par l’équipe à cette démarche.

Toutefois, pour les auteurs du rapport, ces actions demeurent « insuffisantes ». Ils formulent ainsi de nombreuses recommandations dont une concerne directement les professionnels de santé. À savoir, les former, en poste ou en formation initiale (IFSI) à l’urgence climatique, à la transition bas-carbone et à l’éco-conception des soins. Des sujets qui semblent encore parfois éloignés de leur quotidien. « Le prochain rapport qui devrait sortir à la fin de l’année se penchera sur la nécessité d’allier décarbonation avec prévention, promotion de la santé et juste soin, pour une réduction significative des émissions », précise Laurie Marrauld. Une démarche qui fait son chemin.

(1) https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2021/11/211125-TSP-PTEF-Rapport-final-Sante.pdf

(2) https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2023/04/180423-TSP-PTEF-Rapport-final-Sante_v2.pdf

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