Le ministre de la Défense, Hervé Morin, a présenté mardi un plan d’indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Ce projet de loi implique une première dotation de 10 millions d’euros sur les fonds de la Défense pour l’année 2009.
Entre 1960 et 1996, au Sahara et en Polynésie, la France a effectué 210 essais nucléaires. Potentiellement, le texte concerne près de 150 000 travailleurs, civils ou militaires, sans compter les populations qui vivaient dans ces régions au moment des faits. Soit environ 2 000 personnes, pour la Polynésie.
Le ministre, qui concède ne pas avoir, à ce jour, de chiffres précis, parle lui de « quelques centaines de victimes » sans oublier leurs ayants-droit qui pourront obtenir « réparation du préjudice subi ». Ces estimations devront encore être confirmées par « une étude épidémiologique de mortalité concernant les travailleurs du centre d’expérimentation du Pacifique », qu’Hervé Morin a confiée à l’organisme indépendant SEPIA Santé. « Les résultats devraient être connus en septembre 2009. Cette étude sera complétée par une étude de morbidité sur les principales maladies des vétérans », a-t-il indiqué.
« Une commission indépendante, constituée de médecins et présidée par un magistrat, examinera les dossiers au cas par cas », a précisé le ministre à qui revient la décision finale. Cette commission a six mois pour rendre ses propositions.
Dans un souci de « transparence totale », Hervé Morin a dit vouloir un régime d’indemnisation « juste et rigoureux ». Celui-ci s’appuie sur plusieurs principes.
Les décrets d’application fixeront une liste de 18 maladies (cancer du sein, de la thyroïde, leucémie, etc.), basée sur celle du comité scientifique des Nations Unies pour l’étude des effets des rayonnements ionisants (UNSCAER). Et le ministre d’ajouter qu’ « aucun seuil d’exposition » n’est fixé.
La période prise en compte pour donner droit à l’indemnisation couvre la totalité des travaux liés aux essais, démantèlement compris. « Tout le préjudice, notamment moral ou esthétique » sera considéré.
En outre, « ce ne sera plus à la victime de prouver que sa maladie est liée aux essais nucléaires », mais à l’État de démontrer le contraire, s’il conteste. À noter que « le demandeur disposera de possibilités de recours devant le tribunal administratif s’il n’est pas satisfait de la réponse apportée » à sa requête.
M. Morin a par ailleurs indiqué que deux professeurs de l’Académie des sciences et de l’Académie de médecine avaient été chargés de consulter l’ensemble des archives de la Défense afin d’établir pour chaque essai des données précises sur leurs conditions de réalisation. Les résultats seront connus fin 2009.
En effet, le ministère reconnaît des problèmes de confinement pour quatre essais nucléaires menés dans le Sahara, dont le tir « Beryl » du 1er mai 1962. De même, dix essais dans le Pacifique ont donné lieu à des retombées radioactives significatives, sur des zones circonscrites.
Un numéro vert a été mis en place pour transmettre les données nécessaires à la constitution des dossiers des victimes : le 0810 007 025.
RÉMI VAUGEOIS